mercredi 27 mars 2013

Retour à Outreau, de Jacques Thomet

 A l'heure où le juge d'instruction Gentil déchaîne les envolées hystérico-lyriques d'un certain nombre de personnalités politiques et médiatiques, je me suis dit qu'il était peut-être pertinent de se replonger dans une affaire qui avait également abouti au lynchage public d'un autre juge. Pas de scandale politico-financier, mais un sujet autrement plus sordide puisqu'il sera question de la fameuse Affaire d'Outreau, passée à la postérité comme étant un des plus gros fiascos judiciaires de notre pays. Contrairement à nos habitudes, nous nous intéresserons donc à un essai (une première pour ce blog), en l'occurrence à la contre-enquête menée par la journaliste Jacques Thomet, publiée par les éditions Kontre Kulture.

Dans l'imagerie populaire, Outreau rime bien avec fiasco. Le procès qui s'annonçait monstre (à l'image de ce que sera l'affaire du réseau d'Angers) débouchera sur un acquittement massif, sur la décrédibilisation de la parole de l'enfant et, au-delà du cas Burgaud, à la remise en cause de la fonction-même du juge d'instruction. Rien de neuf sous le soleil, mais il faut bien partir de ce constat pour comprendre la démarche de Jacques Thomet dont la posture initiale ne le distinguait pas du quidam convaincu des excès d'un petit juge perdu et d'enfants retords. Alors qu'est-ce qui a fait la différence dans son esprit ? Tout simplement la lecture des 30 000 pages du dossier de l'instruction, complétée ultérieurement par un travail d'entretien avec les victimes, les acteurs d'Outreau et certaines sources judiciaires. Autant dire que cette contre-enquête est placée sous le signe de l'empirisme, et non pas sous une quelconque fièvre complotiste et irrationnelle, virus qui foudroie quiconque questionne les vérités officielles.

On pourrait dire de ce Retour à Outreau qu'il est un ouvrage de réhabilitation. La première réhabilitation concerne les enfants. Les faits parlent d'eux-mêmes. Malgré l'acquittement, 12 des 15 enfants qui ont été entendus à la barre ont été reconnus victimes d'actes pédophiles et indemnisés en tant que tel. Jacques Thomet remonte donc dans le dossier d'instruction, donne du crédit au travail sérieux des experts qui ont entendu les enfants et seront démolis (pour cette raison) par les avocats de la défense à Saint Omer. Plus troublant, le journaliste fouille les dossiers des services sociaux, souvent alertés à propos des signes d'agression sur les enfants. Médicalement, tous les viols sont attestés, et ces rapports auraient pu soulager les victimes ainsi que les experts psychologues harcelés par les 18 avocats de la défense. Jacques Thomet vise aussi l'attitude irresponsable du psychiatre Paul Bensussan, adepte des thèses (très contestées aux Etats-Unis) de Gardner sur la non-prise en compte de la parole de l'enfant. L'attaque est double : non seulement Bensussan n'a conduit aucun entretien avec les victimes d'Outreau (?!) mais le précédent judiciaire affaiblira tout témoignage ultérieur de mineur. De quoi mettre sérieusement à mal l'idée de mensonges en série de la part d'enfants véritablement traumatisés. La deuxième réhabilitation concerne le juge Burgaud. Et ce travail est particulièrement convaincant. Non, le juge Burgaud n'était pas un jeune psychorigide, manipulé par Myriam Badaoui et dépassé par les évènements. Au contraire, Fabrice Burgaud se révèle au fil des pages en travailleur compétent, acharné et qui a presque réussi l'impossible, c'est-à-dire mener une enquête consciencieuse, en ne commettant aucune erreur ou vice de forme, alors qu'il instruisait à la même époque plus d'une centaine d'affaires. Impossible de ne pas saluer le "pestiféré" et ses enquêteurs, surtout si l'on compare son travail avec l'inertie de son successeur à l'instruction, et les divers représentants du parquet.

Reprenons donc l'équation que présente Outreau. Nous avons des victimes reconnues, quatre coupables dont un condamné pour proxénétisme de mineurs. Mais où sont donc passés les clients de cette prostitution ? Sur ce point, le livre de Jacques Thomet suscite effectivement le doute. Le journaliste recoupe toutes les affaires d'Outreau : l'affaire principale, mais aussi les affaires oubliées (Outreau bis 1,2,3) et la récente condamnation du couple Lavier (qui compte parmi les acquittés de l'Affaire de 2004) pour maltraitance et violence sur mineurs. S'il n'incrimine personne explicitement, Thomet installe sur la sellette de nombreux acquittés d'Outreau : Marécaux, Dausque, Martel, Legrand père et fils et l'abbé Wiel. Car les indices ou les anomalies existent dans ces dossiers, et il est étonnant que personne ne les ait jusqu'ici relevé. Le livre va parfois plus loin et attaque les contre-vérités assénés a posteriori par ces acquittés. Marécaux est particulièrement visé à travers le biopic "Présumé coupable" un peu trop favorable à la vision déformée des faits par son protagoniste. Et quid de la communauté médiatique qui n'est pas vraiment à l'honneur dans l'ouvrage ? Si Thomet n'est guère tendre avec des pratiques journalistiques privilégiant l'information quotidienne à la nécessaire prise de recul critique, il est d'autant plus sévère avec une Florence Aubenas auréolée de son statut d'otage. L'auteur de La Méprise a en effet livré un essai à charge, sans visiblement s'enquérir de l'intégralité de l'instruction, et qui aura eu son impact sur le procès en appel et son verdict favorable aux acquittés. 

Les réseaux pédophiles passionnent souvent l'opinion publique en raison de la charge émotionnelle véhiculée par la nature des faits commis. Ils sont aussi de puissants vecteurs de fantasme, ou du moins d'images particulièrement fortes dès lors qu'il s'agit de plonger dans l'atrocité humaine. Dans sa version la plus "évocatrice" cela donne des actes de viols, de torture, de meurtre et de cannibalisme dans le cadre de rituels sataniques protégés par les plus hautes sphères de l'Etat. Ceux qui chercheraient ces éléments dans Retour à Outreau seront déçus. La question des notables est à peine suggérée et pour cause, il y en a peu dans le réseau pédophile d'Outreau. Seuls Marécaux, huissier de son état, et un médecin sont mentionnés. C'est trop peu pour spéculer sur les vices de nos élites. Les meurtres des enfants sont abordés, notamment en première partie de l'ouvrage avec les dernières révélations des fils Delay. Mais au même titre que dans l'enquête du juge Burgaud, le journaliste n'a pas de "corps" pour les éléments avancés. Reste au lecteur d'accorder sa confiance totale dans les propos de Cherif et Dimitri. Quant à la protection de l'Etat et la classe politique, elle est aussi abordée, mais très tard et trop brièvement pour que la réflexion soit satisfaisante. Toujours est-il que la supposée destruction (illégale) des auditions vidéos des victimes d'Outreau, si elle est avérée, est un scandale pour notre République. Il me semble d'ailleurs que c'est dans cette direction que pointe l'ensemble de l'ouvrage. Ce qu'aura révélé l'Affaire d'Outreau et son fiasco du fiasco  (un Fiasco²), c'est l'indigence qu'aura arborée notre Justice tout au long du processus. L'auteur s'attarde longuement sur le dispositif inacceptable des Assises de Saint Omer en 2004 et l'on comprend pourquoi, entre sa surprenante scénographie, les interruptions, les insultes, le tout orchestré par un président sans réaction. Il faudrait également mentionner tous les manquements du parquet ou encore les conditions exécrables dans lesquelles nos magistrats sont amenés à rendre la Justice, mais il ne s'agit pas pour moi de réécrire cette enquête. 

Certes,tout n'est pas parfait dans Retour à Outreau. Jacques Thomet a tendance à rabâcher à divers endroits de l'enquête les mêmes éléments et arguments. Des idées fortes sont suggérées mais non étayées, mais là encore, c'est peut-être trop attendre du travail journalistique qui ne peut se substituer à une enquête policière. On pourrait aussi chipoter sur le travail éditorial, ses quelques coquilles et son format qui ne permet pas toujours une grande visibilité des fac-similés. Mais c'est véritablement pinailler face aux immenses mérites de l'ensemble. Dans un style sobre qui ne tombe jamais dans un pathos malvenu, Jacques Thomet réussit son entreprise, car à force de pointer les dysfonctionnements et les non-dits dans l'affaire d'Outreau, le lecteur doute. Et quand le scepticisme point, la critique n'est jamais loin. Une attitude citoyenne somme toute fondamentale quand il est question d'une des fonctions régaliennes de notre état.

PS : Il vous sera à mon avis difficile de vous procurer le livre en librairie. Si vous êtes intéressé, il faudra se rendre sur leur plateforme marchande, ici

mardi 26 mars 2013

Rencontre avec Jacky et Barny Vaucher, le Samedi 30 mars 2013

"Calanques, un siècle d'amour et de vigilance" ... au Bar du XXème

avec la librairie Préambule

le samedi 30 mars - 11 h / 13 h


"Calanques : Un siècle d’amour et de vigilance" par Jacky Plauchud Vaucher et Barney Vaucher
... ou comment un territoire de passions devient un parc national.



Depuis plus d’un siècle, des milliers de personnes, célèbres ou anonymes, ont mené une lutte acharnée pour préserver les Calanques de Marseille à Cassis. Les rêveurs, qui pensent que la beauté de la nature est intouchable, seront effarés de découvrir les dangers auxquels a échappé la seule côte sauvage restant entre l’Italie et l’Espagne. La défense des Calanques est, en effet, une longue histoire dont le premier élément marquant est la manifestation du 13 mars 1910 à laquelle s’associe, entre autres, Frédéric Mistral. Un siècle après, le 18 avril 2012, une nouvelle page s’ouvre avec la création du Parc national des Calanques.
Activement présents depuis près de 50 ans, Jacky et Barney Vaucher ont été les témoins privilégiés de cette lutte. La narration qu’ils en font est riche d’intrigues et de rebondissements. C’est un récit captivant tant on découvre, une fois de plus, que la réalité dépasse la fiction. C’est aussi un témoignage capital qui donne la parole aux différents protagonistes et qui passionnera tous ceux qui s’intéressent à la défense de notre environnement et à la gestation d’un parc national. C’est enfin un hommage à toutes ces générations de Marseillais qui ont eu à cœur de conserver, à côté d’une cité à l’histoire grandiose, un monument de nature et de biodiversité. Lire un extrait.



Amoureux des Calanques, Jacky et Barney Vaucher se sont impliqués dans leur défense dès les années soixante. Issus du Club Alpin Français (CAF) et des Excursionnistes Marseillais, ils ont vécu de l’intérieur quarante années de mobilisation ainsi que la gestation du Parc national des Calanques. Jacky a été active pendant 16 ans au sein de l’équipe d’Union Calanques Littoral (UCL). Barney, grimpeur réputé et écrivain, est l’auteur de plusieurs ouvrages, en particulier « Des rochers et des hommes » consacré à « 120 ans d’escalade dans les Calanques », ainsi que « Les Fous du Verdon », saga de l’histoire de la grimpe dans le Canyon.



et pour en savoir plus...

RENDEZ-VOUS LE SAMEDI 30 MARS - 11H - au bar du XXème siècle

Nous vous attendons nombreux
Amicalement votre
Préambule

mardi 19 mars 2013

Printemps littéraire 2013 de Préambule

Soit béni ô mois de mars, symbole du Printemps salvateur, annonciateur des jours ensoleillés, consacrant le retour des touristes et autres flâneurs attirés par le littoral cassiden. Le mois de mars rime aussi chez nous avec renaissance littéraire, puisque nous sommes prompts à mettre le grappin sur écrivains et auteurs, encore engourdis par de longues semaines d'hibernation forcée. Dans cette optique, l'équipe Préambule, enfin surtout François, s'est creusée la tête pour concocter un Printemps 2013 qui saura, j'espère, rencontrer votre enthousiasme. Une saison littéraire placée sous le signe de l'éclectisme, signe de la richesse de notre région et des talents qui y opèrent. 

Sans plus attendre, je vous livre les noms de ceux qui accompagneront vos pérégrinations culturelles.

- Samedi 30 mars : Bernard Vaucher.
  • "Calanques, un siècle d'amour et de vigilance", Editions Paroles.
  • "Des roches et des Hommes", Editions de l'Envol.
 
- Samedi 6 avril : Yann Letestu et Michel Allione
  •  "Marseille 1905-1944", Editions Couleur de vie.
 
- Mercredi 17 avril :  José d'Arrigo
  • "Marseille Mafias", Editions du Toucan.
 
- Mercredi 1er mai : Bernard Plossu
  • "La Montagne Blanche", Editions Images en Manoeuvre.
  • "Marseille", Editions Images en Manoeuvre.
 
- Vendredi 10 mai : Fernando Ferreira
  • Ouvrage sur Cassis (détail à venir)
 
- Samedi 25 mai : Rudy Ricciotti
  • "L'architecture est un sport de combat", Editions Textuel. 
  • "Mucem"
 

Nous aurons également le plaisir d'accueillir Didier Deschamps, Pierre Blasi, Eric Paradisi, Christian Estebe, Guyette Lyr, et je reviendrai vers vous dès lors que les dates seront fixées. 

A très bientôt, et suivez de près sur ce blog les futures annonces. 

En attendant, je vous souhaite à toutes et à tous d'excellentes lectures. 
 


dimanche 17 mars 2013

Northlanders : le chef d'oeuvre de Brian Wood

Dans ce billet, je me propose de monter un petit dossier sur une de mes dernières grosses claques reçues par une série, en l'occurrence l'hypnotique Northlanders, bébé de Brian Wood, qui démontre une nouvelle fois, si besoin en était, l'excellence du label Vertigo. Je ne suis pas un expert (loin de là) de l'oeuvre de Brian Wood et pour restituer la place de Northlanders dans sa bibliographie, je préfère vous renvoyer à une vidéo du célèbre duo d'Arkham Comics. Comme le hasard fait bien les choses, c'est grâce à cette vidéo que je me suis décidé à acheter mon premier tome de Northlander, qui plus est dans leur magnifique librairie rue Broca à Paris. 

Un petit avertissement, les tomes que je vais vous présenter sont uniquement parus en version originale. Pour être plus exact, Panini avait en son temps sorti deux tomes autour du personnage de Sven, avant qu'Urban ne récupère les droits de DC (et donc du label Vertigo). La filiale de Dargaud ne s'est toujours pas décidé à l'annoncer en vf mais aux yeux de l'évolution de leur catalogue (fin des séries 100 Bullets, DMZ et Scalped probablement dans l'année) ne soyez pas surpris si Urban ne se décide finalement à le publier. Autre avertissement pour les futurs lectrices et lecteurs de Northlanders, une des spécificités de la série est que les tomes ne se suivent pas, et donc libre à vous d'entrer dans le monde des Northmen à n'importe quelle numéro, selon la thématique qui vous sied le plus. Northlanders ne s'apprécie donc pas comme une grande fresque unifiée sur les Vikings, mais plutôt comme une mosaïque sur cet univers particulier, structure narrative qui respecte justement une culture caractérisée par le nomadisme marin et donc la pluralité, le morcellement. Il était au contraire bien plus intéressant de varier les angles d'approche, que ce soit dans les périodes ou les sphères géographiques, pour tirer la quintessence d'une thématique bien plus complexe que la simple évocation du bourrin qui débarque de son drakkar. 

Norhlanders book 1 : Sven the Returned.
Dessins de Davide Gianfelice
contient Northlanders #1-8

Pour son premier arc, Brian Wood plante le décor de son intrigue autour de l'an Mil, entre le Bosphore et les îles Orkney (c'est pas la porte à côté, je vous l'accorde). Le scénariste s'attarde autour du personnage de Sven, brillant marin et puissant guerrier membre de la garde varangienne de l'empereur byzantin. Après des années passées dans la chaleur satinée de Constantinople, le passé rattrape Sven sous la forme d'un drakkar nordique qui l'informe de la mort de son père, et de l'usurpation de tous ses titres par son oncle. Evidemment, le retour au bercail ne s'annonce pas aisé, et une longue et harassante lutte de succession s'engage, sur fond de menace d'invasion saxonne. Diablement efficace et entraînant, cet arc plante immédiatement le décor de Northlanders. Autour de son personnage principal, Brian Wood nous rappelle que le monde est violent, cruel, et qu'il n'y a pas grand chose à attendre de son prochain. Le retour au pays n'est pas ce "home sweet home" tant vanté ou espéré, mais évoque au contraire la fin de l'innocence, la destruction des souvenirs de l'enfance, la perte définitive des repères et un amer repli sur soi. Brian Wood nous dresse également un portrait atypique de femme forte, sachant que la question de la place des femmes dans les sociétés nordiques sera un thème récurrent de la série. Au niveau des dessins, Davide Gianfelice donne également un peu le ton de ce que sera le graphisme de Northlanders, avec un style très européen, avec des traits secs, des visages anguleux, qui matérialisent plutôt bien la dureté de l'atmosphère dépeinte. 

Northlanders book 2 : The Cross + The Hammer
Dessins de Ryan Kelly
contient Northlanders #11-16

Ce deuxième volume est construit autour du deuxième arc de Northlanders après trois épisodes one-shots. Il est ici question de la cavale sanguinaire d'un rebelle connu sous le nom de Magnus, traqué par l'émissaire du nouveau roi d'Irlande. Autour de cette chasse à l'homme dans la campagne irlandaise, se joue plusieurs intrigues : l'attachement maladif d'un homme à sa fille, l'aveuglement démentiel pour une cause juste, la notion d'honneur et de résistance. Encore une fois le récit est particulièrement sombre et violent, l'hémoglobine s'invite dans quasiment toutes les pages. Avec Magnus, nous avons une sorte de synthèse entre William Wallace et John Rambo, un résistant prêt à tuer tout ce qui se trouve sur son chemin, quitte à faire basculer l'ensemble de la région dans la folie. Si des thèmes forts sont abordés, ce récit est surtout brillant par sa construction, et l'on se demande jusqu'où Brian Wood compte nous emmener. Tout se joue dans un puissant final qui vous donne la chair de poule, et vous permet de reconsidérer toutes les pages que vous venez de lire. Waou... Au niveau du dessin, c'est là aussi très très bon, dans ce qui est à mon avis, un des volumes les mieux illustrés de la série. 

Northlanders book 3 : Blood In The Snow
Dessins de Dean Ormston, Vasilis Lolos, Danijel Zezelj, Davide Gianfelice
contient Northlanders #9,10, 17-20

Le troisième volume est composé de  récits courts qui s'étendent sur un ou deux numéros. C'est tout simplement un de mes tomes préférés. On sent que Brian Wood est parfaitement à l'aise avec l'exercice du one-shot, et que cela lui permet de resserrer ses histoires autour de thèmes puissamment évocateurs. Dans le premier récit, Brian Wood aborde pour la première fois la question du conflit interreligieux entre Christianisme et Croyances Nordiques. Il faut noter le tour de force opéré, puisque cette question est traitée par le biais de la perception et de l'imaginaire d'un enfant qui cherche à se libérer d'une famille et d'une culture qu'il abhorre. Beaucoup de choses passent par la composition des planches, notamment une double page hallucinante sur l'arrivée de drakkars titanesques et quasi-surnaturels respectant l'angle de vue du gamin. Un autre récit s'apprécie comme une dissertation sur le credo nordique, la philosophie de vie et les dilemmes des vikings autour d'un duel entre deux champions. L'écriture est assez complexe (moi j'ai lutté pour tout comprendre), mais la construction est là encore absolument brillante. Le troisième récit traite de femmes vikings résistants à des envahisseurs saxons. Brian Wood ressasse ses marottes (les conséquences de la guerre sur les femmes, le conflit religieux) tout en rajoutant une touche bienvenue de fantastique. Cerise sur le gâteau, le tome se conclut sur le personnage de Sven, cette fois-ci Immortal, que l'on retrouve dans les îles Féroé. Un bel épilogue pour Sven, avec une réflexion très bien orchestrée sur l'absurdité des notions de gloire et l'imbécilité des aspirations d'une jeunesse ignorante. 

Northlanders book 4 : The Plague Widow
Dessins de Leandro Fernandez
contient Northlanders # 21-28

Retour ici sur une histoire un peu plus conséquente. Bienvenue sur les bords de la Volga, en plein contexte de la Peste Noire. Suivant les conseils d'un moine aux méthodes radicales, le chef d'un village décide de sceller les portes pour s'isoler complètement de l'extérieur et de l'arrivée des germes de la maladie. Dans le village on suit en particulier un jeune veuve dont la mari vient d'être emporté par la peste, et qui doit gérer son nouveau statut alors face à la convoitise et à la mesquinerie des hommes. Une fois encore, Brian Wood s'intéresse à la cause des femmes, tout en élargissant son propos. Jouant la carte du huis clos, le scénariste étudie ce microcosme humain sous pression, avec tout ce que cela implique de tensions politiques, humaines et religieux. Autant vous dire que ce récit est probablement un des récits les plus pessimistes de toute la saga, et révèle en tout cas le désenchantement total que peut éprouver Brian Wood vis-à-vis de ses congénères. Misogynie, obscurantisme, perversité, tout y passe. Le huis clos se mute ainsi en une montée inexorable vers la folie. Pour ne rien gâcher, les dessins de Fernandez sont sublimes et rendent honneur à cette histoire bouleversante. 


Northlanders book 5 : Metal and other stories
Dessins de Fiona Staples, Riccardo Burchielli et Becky Cloonan
contient Northlanders #29-36

Encore une fois ce tome est passionnant. Parlons tout d'abord du gros morceau qu'est Metal et qui occupe cinq des huit numéros compilés. Il sera à nouveau de question de conflit interreligieux, lorsque un forgeron norvégien reçoit un message de la déesse Hulda qui lui intime de prendre les armes et de dérouiller tout ce qui ressemble de près ou de loin à un chrétien. Metal parle aussi d'amour, puisque notre forgeron sauve une prisonnière albinos, héritière de traditions chamaniques. L'arc rappelle un peu la traque du deuxième tome, mais la tonalité diffère. Notre héros ici est une sorte de Conan christianophobe sous champi hallucinogènes, et la "quête" tient autant du délire sous acide que d'une dramatique fuite en avant. Toujours est-il que l'histoire est vraiment jouissive, et que rarement Brian Wood n'aura flirté avec le fantastique jouant finement avec l'ambiguïté introduite par les substances psychotropes. Les deux autres récits, plus courts sont aussi très intéressants. Pour une fois, Wood décide de s'attarder sur l'aspect aventurier de ces marins de l'impossible autour de la découverte du Groenland, qui rappelle (un peu) l'atmosphère du film Valhalla Rising, mais en plus bavard. L'histoire qui conclut le tome est plus poétique et mélancolique, autour de la découverte par un vieil homme d'une jeune femme emprisonnée dans la glace des montagnes islandaises. Rien à dire sur les dessins, on est dans la note. 

Northlanders book 6 : Thor's Daughter and other stories
Dessins de Marian Churchland, Simon Gane et Matthew Woodson
contient Northlanders #37-41

Le sixième volume signale le retour des récits courts. La première histoire, en trois parties, a pour cadre le siège de Paris de 885 par les Vikings. Brian Wood démontre encore qu'il est très à l'aise pour dépeindre l'absurdité de la guerre, et sur ses conséquences dans les psychés humaines. Efficace dans les scènes attendues (scènes de bataille, vie difficile dans les tranchées, incompréhension des manœuvres politiques), le récit est surtout transcendé par un final encore une fois parfait où Wood caractérise magnifiquement l'obsession humaine. Les deux autres one-shots sont un ton en dessous. Le premier orchestre une nouvelle scène de chasse, mais cette fois-ci entre un chasseur et un cerf, et sur la solidarité qui lie les deux êtres dans un environnement hostile. C'est bien ficelé, mais sans plus. Idem pour le pourtant alléchant "Thor's Daughter" qui parle là-encore d'une femme mise devant le fait accompli et devant affronter un univers masculin. C'est un poil trop attendu et Birna est moins intéressante que les précédents personnages féminins que Wood avait pu construire. 

Northlanders book 7 : The Icelandic Trilogy
Dessins de Paul Azaceta, Declan Shalvey et Danijel Zezelj 

contient Northlanders #42-50

Pour conclure sa série, on était en droit d'attendre un arc en bonne et due forme de la part de Brian Wood. Et force est de constater que notre scénariste a mis les petits plats dans les grands avec cette trilogie islandaise. Un récit en trois parties, qui correspondent à trois périodes retraçant le destin de la dynastie des Hauksson. L'histoire est en quelque sorte une sorte de best-of de toutes les thématiques précédemment abordées dans Northlanders : l'esprit pionnier des Nordiques, l'environnement hostile, les rivalités et guerres tribales, l'arrivée du Christianisme et les conflits religieux, un personnage féminin particulièrement fort et dur, l’insouciance de la jeunesse et l'illusoire gloire militaire. Comme à son habitude, Brian Wood brille par son écriture, que ce soit dans la composition de sa saga familiale, dans des dialogues souvent percutants, ou encore dans une montée en puissance que l'on apprécie au fur et à mesure que l'on tourne les pages. Je vais me permettre une nouvelle comparaison littéraire, mais il y a du Cent Ans de Solitude dans cette histoire, avec cette trame d'ascension/déchéance d'une famille, d'un clan qui se perd dans les neiges islandaises. Arriver à retrouver le souffle épique d'un Garcia Marquez en une centaine de pages, prouve, si besoin en était, quel est le talent du bonhomme. 


Nous tenons bien avec Northlanders une série majeure, un chef d'oeuvre d'écriture, d'intelligence narrative, de finesse thématique. Il est vrai que j'appuie souvent sur ce point, alors autant préciser que Brian Wood n'oublie jamais qu'il a entre les mains un de peuples les plus guerriers de l'histoire occidentale. Northlanders brille tout autant par ses scènes d'actions à la violence brute qui satisferont tous les fans de décapitation sauvage et autres démembrements. Certes, certains récits sont parfois moins intéressants que d'autres, mais l'ensemble frôle le sans-faute. Pour les Voistes, aucune hésitation à avoir. Pour les autres, mettez-vous sérieusement à l'anglais, ou commencer à réclamer ce bijou à Urban Comics.

mardi 12 mars 2013

The Goon, Tome 10

The Goon, T10

Contient The Goon #34 à 37 + An Irish Wake + The Goon's on Vacation



Avec la sortie du dixième tome par Delcourt, l'occasion était trop belle pour ne pas vous parler de ma série coup de coeur, The Goon, et son génial créateur, Eric Powell. Autre occasion pour vous parler de ma vie, puisque The Goon, quoique à l'insu de mon plein gré, m'avait permis de renouer avec le monde des comics. Un éloignement de plus de dix ans (ah qu'ils étaient loin les Strange de la prime enfance) et effacé sans mégarde par une critique dithyrambique d'un Mad Movies de 2005. Depuis, la passion avec le titre est toujours enflammée et c'est non sans une certaine fébrilité que je découvre les nouveaux tomes, caresse sensuellement la couverture cartonnée avant d'entrouvrir délicatement les pages afin de mieux pénétrer cette lecture torride. Voilà ça c'est pour Google. Plus sérieusement, The Goon est tout de même comparable à une histoire d'amour, voire au mariage. Et oui, la promise est belle, mais elle ne s'offre qu'au preux chevalier prompt à s'engager dans la durée. 10 tomes en 8 ans (ou 43 issues depuis 1999 pour les voistes) !! Si ça, ça s'appelle pas avoir de la patience, je ne sais pas ce que c'est. Bon l'avantage, c'est que chaque lecture est aussi orgasmique qu'un matin de Noël, et The Goon fait indéniablement partie de ces séries, à l'instar des meilleurs productions de Vertigo, où l'on n'est jamais déçu. 

En revanche, si je vous parle du contenu de The Goon, l'aspect romantique que j'avance depuis le début de ce billet vous paraîtra suspect. La série est un melting pot improbable entre du western du type Pour une poignée de dollars, du fantastique à la Caravane de l'étrange, de l'absurde et des zombies. Et ce dernier point me semble important car The Goon a anticipé, initié, précédé (rayez la mention inutile) la mode zombie dans les comics, en tout cas a réintroduit le thème avant le blockbuster The Walking Dead, l'inégal univers Marvel Zombies et les ovnis du type Jesus Hates Zombies. Il est aussi assez difficile de définir ce qu'est The Goon, véritable, ovni du comics coincé entre la saga et l'empilement de sketchs. Certes il y a un fil rouge entre les différents numéros, mais un grand nombre d'épisodes fonctionnent aussi comme des one-shots, autant d'aventures débiles à la conclusion complètement déjantée ou consacrant à l'occasion un crossover impossible. Je sais que là encore je pèche par manque de clarté, mais il faut me comprendre. Regardez ce dixième tome qui met tour à tour en scène le gang des vampires scintillants et la monstrueuse fille pré-pubère, une foire aux monstres dégénérés, l'arrivée d'une stripteaseuse bisexuelle lubrique et vénale, un drame social dans une manufacture ouvrière, un vol de saucisses de Francfort puis l'arrivée de supers-héros qui se conclut par une baston générale dans Jungle Clodo, et enfin un épilogue philosophique sur l'attitude à adopter face à un gobelin nécrophage. Voilà, The Goon c'est tout ça ! 

Et pourtant je n'ai qu'un conseil à vous donner : lisez The Goon !!! Déjà parce que l'univers personnel d'Eric Powell n'est pas si chaotique et forme un ensemble bougrement intéressant. Eric Powell adore ses personnages, ça se voit, ça se sent et ça s'apprécie. Leur caractérisation est impeccable, leur background parfaitement travaillé. Mine de rien, il arrive à Powell d'être sérieux et de traiter avec un talent certain des failles humaines, des drames personnelles et des plaies ouvertures qui ne se refermeront jamais. The Goon est aussi un comics bourré d'action, avec son héros en gangster testostéroné qui parle avec ses paluches et distribue un nombre incalculable de bourre-pifs par épisode, et son sidekick aussi prompt à balancer des blagues salaces qu'à jouer de la sulfateuse. Mais surtout, The Goon est drôle. Non c'est pas tout à fait ça. The Goon est putain de drôle !! Voilà, là on est plus proche de la réalité. Concrètement c'est la seule série qui m'arrache de francs éclats de rire à chaque épisode de chaque tome. L'humour powellien est un délicieux mélange de pipi-caca régressif, de situations absurdes, de running joke hilarantes, de dialogues à la WTF, d'une immoralité absolue (ce qu'il fait faire et dire aux gamins...) et d'une irrévérence totale pour tout un pan de la culture populaire. Par exemple dans ce tome 10, vous saurez comment Powell réinterprète Twilight ou comment Bob Dylan vient à être ingurgité dans son univers. Vous aurez en outre des pages à se pisser dessus sur le monde du comics, Powell se jouant de tous les codes du super-héros : le nom ridicule, les tics artistiques des dessinateurs, les backgrounds débiles. Allez je ne peux pas résister à vous livrer à un passage un peu spoilant, mais ô combien révélateur de la tonalité qui vous attend à toutes les pages et cases de cette série géniale. 

Franky : Qui a besoin de super-pouvoirs quand on a un fusil à double canon, sale renifleur d'étrons !!

The Goon : Et que ça te serve de leçon. Les bandes dessinées de super-héros sont pour les pédophiles racistes. Sois un homme. Pas un violeur de bébé judéo-mexicains !

Franky : C'est vrai. Lire des bandes dessinées de super-héros conduit à la solitude et à la virginité. La colère et la frustration sexuelle te feront haïr ton prochain et bander pour les enfants comme ces tordus de prêtres. Lire des BD décalées comme The Goon et Billy The Kid et la foire aux monstres (autre série d'Eric Powell, ndp) te donne l'air viril et intéressant et conduit à des tonnes de vagins. Des tonnes. 
Il est certain que j'ai une tendance à l'hyperbole et au superlatif dès lors qu'une lecture m'enthousiasme. Il n'empêche que The Goon  trône indéniablement dans mon hall of fame des comics tant il cumule les qualités : des personnages hauts en couleurs, une narration en béton, des dessins qui collent parfaitement à l'ambiance 30's/40's de la série, un humour ravageur et une auto-dérision permanente. Tout ce que demande le peuple, Powell le lui accorde, et au centuple. Chapeau bas ! Et cerise sur le gâteau, l'édition française est particulièrement soignée. Entre la traduction vraiment réussie, le cartonné et les bonus (croquis, variant covers), on ne peut que saluer le boulot effectué par Delcourt, qui tient là à mon avis, le véritable bijou de leur catalogue comics.

mercredi 6 mars 2013

New 52 : Aquaman #17, Batman the Dark Knight #17, Justice League Dark #17

Voilà les retardataires du mois de février en ce qui concerne la production de DC. Habituellement, j'ai toujours un décalage  d'un numéro avec les trois séries en question, victimes de leur parution en quatrième semaine. Place donc à Aquaman, Batman the Dark Knight et Justice League Dark

Aquaman #17 (Geoff Johns/Paul Pelletier) : 


Je l'avais signalé dans une précédente chronique, Throne of Atlantis  a laissé des traces sur la Justice League mais aussi sur Aquaman. Ce numéro est d'ailleurs présenté comme un épilogue au crossover, et fonctionne comme une ouverture vers les futurs enjeux qui guettent notre héros. Aquaman a finalement décidé d'embrasser son destin, mais cela ne va pas sans mal. Petit flashback : Geoff Johns a placé la quête identitaire d'Arthur au coeur de son run, en appuyant le fait que l'héritier d'Atlantis était défini par l'entre-deux, l'éternelle frontière, l'impossible acceptation par deux mondes qui le rejettent. Auparavant raillé, le héros ne fait cependant plus rire, surtout depuis que les humains ont vu le pouvoir de nuisance d'Atlantis. Geoff Johns poursuit dans ce #17 la thématique mais inverse l'approche car c'est au tour des Atlantes d'interroger Arthur. La question est donc posée : pour qui se bat Aquaman et où va sa loyauté ? Pas de réponse définitive, mais une belle double-page qui éclaire le lecteur. Rien à dire, Geoff Johns sait où il va, et j'attends la suite avec une certaine impatience. Un petit mot sur les dessins, et là je vais être moins dithyrambique. Que s'est-il passé avec Pelletier ? J'ai l'impression que son trait est bien moins fin qu'à l'accoutumée, le costume d'Aquaman est grossièrement taillé, et on ne peut pas dire que la colorisation un peu terne mette en valeur les dessins. Seules les scènes sous-marines s'en sortent un peu avec les honneurs.

Batman the Dark Knight #17 (Gregg Hurwitz/Ethan Van Sciver) :


Gregg Hurwitz continue tranquillement son run sur le Mad Hatter. Un run qui sera finalement très court, trois numéros seulement. Autant vous dire que le numéro est chargé : on nous livre l'essentiel du plan du bad guy, une partie de sa mise en branle avec une première intervention de Batman, le tout entremêlé de flashbacks sur la jeunesse du Mad Hatter et ses amours avec une certaine Alice (symbole, symbole). Batman est d'ailleurs en retrait tout au long de l'épisode, idem pour Bruce Wayne qui vient de larguer sa pianiste, et ce n'est pas plus mal car la narration sur le Mad Hatter est très intéressante. L'avantage de l'arc accéléré, c'est qu'on ne s'ennuie pas une seconde, d'autant que le style d'Hurwitz est agréable, se permettant même quelques plaisanteries sur les clichés batmaniens. Vivement la conclusion. Pour ne rien gâcher au tableau, les dessins de Van Sciver sont toujours aussi beaux, et colle parfaitement à l'ambiance de BTDK. 

Justice League Dark #17 (Jeff Lemire/Ray Fawkes/Mikel Janin)  :


L'arc Death of the Magic continue. Lemire et Fawkes ont décidé d'un petit peu levé le pied sur les explications tarabiscotées de la collision inter-univers (il y en a tout de même encore un petit peu, que les amateurs se rassurent). Mais place à la fight et à la rébellion des magiciens. Nos héros emprisonnés ne le restent pas longtemps (avec du grand Frankie, un personnage qui est vraiment attachant dans la JLD) et sont en passe de fausser compagnie à leurs geôliers techniciens. Quant au petit Hunter, en un petit numéro, il accepte sa destinée et s'érige en leader des dernières forces magiques (un revirement quelque peu rapide je trouve). La bataille commence... Comme toujours dans les numéros où l'action prime, on est tenu en haleine de bout en bout et l'on passe un bon moment de lecture. Lemire et Fawkes ne sont pas forcément transcendants, mais ils font le boulot en faisant confiance aux personnages qui tirent la série vers le haut. Mikel Janin assure toujours autant sur les dessins, c'est dynamique et beau.

Hellblazer #300 : Farewell John Constantine


Loin d'être un expert et un assidu lecteur de tous les blogs et sites traitant plus ou moins de comics, j'ai tout de même l'impression que le changement de cap opéré sur la série Hellbazer est sérieusement passé sous le radar. Ce n'est pas du mainstream, soit, mais il me semblait que l'arrêt de la plus longue série ongoing du label Vertigo à son #300 méritait un autre traitement. J'adorerais vous rédiger un dossier, que dis-je, un mémoire, un essai sur les mérites de cet univers horrifico-magique absolument génial, mais les moyens me manquent sérieusement. Ce billet prendra la forme d'un hommage très personnel autour de cet ultime numéro (snif). 

Je vais encore vous parler de ma vie (et vous avez toutes les raisons de vous en foutre), mais ma rencontre avec John Constantine dans le monde des comics a été une putain de claque. Cela remonte à 2008 lorsque Panini décide de publier en Big Book le run originel de Jamie Delano. Le virus est inoculé, et je n'ai cessé depuis de me ruer sur toutes les publications vf, au point que j'envisage de me mettre sérieusement au costard/trench coat. Un petit tacle se doit d'ailleurs d'être adressé à Panini qui a eu une manière assez bizarre de nous faire parvenir la série. Un petit listing rapide : 
- Deux tomes du run de Delano (Hellblazer #1-13, plus des annuals et du Swamp Thing)
- Un tome du run de Garth Ennis (Hellblazer #41-49)
- L'intégralité du run de Mike Carey (Hellblazer #175-215, plus un one-shot)
- La moitié du run d'Andy Diggle (Hellblazer #230-239). 
 Mentionnons aussi le travail des éditions Toth qui ont publié l'intégralité du run de Brian Azzarello en trois tomes (Hellblazer # 146-174)
Les trous sont donc légions, et bon courage pour les complétistes, parce qu'Urban Comics ne semble toujours pas décidé à publier de manière sérieuse du Hellblazer. Ce qui est presque incompréhensible (pour le fan hardcore que je suis) c'est une des rares séries où la qualité a toujours été au rendez-vous. Une quasi-anomalie pour une série si longue, mais largement explicable par le nombre hallucinant de talents qui se sont succédé sur le titre : Jamie Delano, Garth Ennis, Warren Ellis, Brian Azzarello, Mike Carey, Denise Minna, Andy Diggle et Peter Milligan. Hellblazer c'est quelque part toute l'histoire du comics britannique, et John Constantine, l'avatar d'une tradition punk et rebelle, le doigt tendu de Sa Majesté face à une certaine culture ricaine aseptisée. En tout cas, c'est comme ça que je le fantasme. 

Face à la pénurie de publications vf, je me suis donc mis à la VO, en achetant deux/trois tomes par ci par là, mais surtout en prenant en route le run de Peter Milligan au #294, sans savoir que six numéros plus tard, l'aventure s'arrêterait définitivement. Bon et ce #300 ? C'est bien d'ergoter sur la série, mais qu'en est-il de sa conclusion ? J'ai franchement beaucoup de mal à me prononcer, et ce qui est sûr c'est que je ne suis pas emballé comme je devrais l'être. On retrouve bien évidemment les caractéristiques de la série, à savoir un John Constantine qui doit à nouveau biaiser la mort. Il me semble d'ailleurs que Milligan a choisi de récupérer les Fates introduite par Garth Ennis, et que Constantine avait bien baisées en son temps. L'écriture se concentre surtout sur la famille de John : sa femme, Epiphany, sa nièce Gemma, et son neveu, Finn qu'il vient de découvrir. Et c'est là que le bât blesse. Je ne sais quand et comment Milligan a été averti de l'arrêt de la série. Faisons l'hypothèse que cela a été le cas comme tout le monde en novembre 2012. Dès lors on comprend que le scénariste en avait forcément sous le pied et comptait à terme travailler une relation John/Finn à peine esquissée et suggérée dans les #299-300. On sent aussi que Milligan a pu être pris au dépourvu et a du concocter fissa une fin relativement crédible, tout en laissant de côté un paquet d'éléments fondamentaux (quid de Cheryl ? Trois cases sur Chas ?!). Dommage, surtout qu'au niveau de l'émotion et du rendu de la conclusion, on était en droit d'attendre un petit peu plus. Après, je veux bien aussi admettre mes propres lacunes, car manifestement la relation entre John et Gemma que Milligan a développée dans son run est indispensable pour apprécier ce dernier numéro... j'avais quitté Gemma en adolescente brune, là c'est une femme plus mûre et blonde, donc j'ai forcément raté quelque chose. Tant pis... 

Ah... je n'en reviens toujours pas que Hellbazer soit fini. Et je suis un peu énervé. Pas du tout contre Milligan, qui a livré le run le plus long sur le titre (50 numéros !), et qui a fait ce qu'il a pu dans les délais impartis. Je suis par contre plus énervé contre DC qui a décidé de sacrifier le mythe au profit de ses New 52, et d'une Justice League Dark qui marche bien. Une nouvelle victoire des stratégies commerciales sur l'artistique pur...  car dès le mois de mars, John Constantine sera doté de sa propre série solo, version New 52, avec Lemire et Fawkes au scénario. Et je rejoins l'avis de certains lecteurs US qui ne comprennent pas pourquoi deux versions ne pouvaient pas survivre ensemble (une version Vertigo, et l'autre New 52). On peut en tout cas être sûr d'une chose, c'est la fin d'un John Constantine égoïste, provocateur et complètement immoral, antihéros absolu et génial, emmerdeur des anges et cauchemar des démons, un vrai fils de pute qu'on adore détester.

mardi 5 mars 2013

Geoff Johns présente Superman Tome 1

Geoff Johns présente Superman Tome 1

Le dernier fils

contient Action Comics #844-846, 851 & Annual #10-11

 

Pour ne pas pas faire de jaloux, on va passer à une petite chronique de comics vf, avec cette nouvelle parution d'Urban Comics, troisième titre de la collection "DC Signatures" qui met en exergue les grands runs des scénaristes phares de DC. Le choix d'Urban de consacrer encore une fois Geoff Johns sur Superman a de quoi surprendre. Un petit mot s'impose sur la place qu'occupe le kryptonien dans la trajectoire de l'architecte made in DC. Magneto Geppetto !

Geoff Johns a en fait connu deux périodes sur Superman. La première correspond à ses débuts de scénariste. Manifestement convaincant sur le titre JSA (Justice Society of America) sur lequel il officie depuis 2000, DC décide de confier au jeune Johns rien de moins que la série Superman en 2002, qu'il mènera pendant un peu plus d'un an. Mais ce n'est pas à ce premier essai que s'intéresse ici Urban. Car Geoff Johns reprend du service sur Superman en 2006, mais cette fois-ci, c'est sur Action Comics qu'il opère, et ce jusqu'en 2010 ( quoique de manière erratique et discontinue). Force est de constater que ce run, pourtant conséquent en termes de numéros, est plutôt méconnu. Le run sur Action Comics est quelque part coincé entre les gros projets que Johns vient d'achever à cette époque (Infinite Crisis, 52) et surtout le gros travail de réhabilitation entrepris sur Green Lantern depuis 2004 et qui débouchera en 2010 et 2011 sur les crossovers blockbusters Blackest Night et Brightest Day. Je dirais donc que c'est tout à l'honneur d'Urban Comics de publier ce qui était, à ma connaissance, jusque-là inédit chez nous en France. Un dernier mot sur le recueil "Le dernier fils", qui ne correspond pas au début du run à proprement parler, mais qui est symboliquement important. Sur cet arc, Geoff Johns collabore avec Richard Donner (réalisateur des mythiques Superman 1 et 2) dont il a été auparavant l'assistant. C'est d'ailleurs ce travail d'assistant qui lui ouvrira les portes de DC. La boucle étant bouclée, place à la critique de ce tome 1. 

L'intrigue du dernier fils rappelle furieusement le script de Superman 2 (doit-on suspecter la présence de Richard Donner ?). L'arrivée sur Terre d'un mystérieux enfant chamboule la vie de Clark Kent. Non seulement le bambin parle le kryptonien, mais est capable de soulever des objets qui font dix fois son poids. L'armée décide assez rapidement de le mettre à l'ombre. Erreur grave, puisque Superman leur ravit l'enfant et envisage un temps de l'éduquer avec Loïs Lane (ils sont à ce moment en couple, la journaliste connaissant son identité secrète). Bien sûr, tout ce beau monde ne va pas rester tranquille très longtemps, puisque vont débarquer de (spoil) le général Zod et ses sbires prêts à conquérir la Terre pour en faire leur nouvelle Krypton. Comment vont réagir Superman, l'enfant et  que diable vient faire Lex Luthor dans ce joyeux bordel ?

Sans être révolutionnaire, cet album ressasse de manière extrêmement efficace certaines thématiques propres à Superman : l'inévitable destruction de l'âge d'or (Krypton), le legs familial, la mélancolie d'un Superman incompris et seul sur Terre, la question de la fidélité à la terre d'origine ou à la terre d'accueil mais aussi la propre fibre paternelle d'un Kal-El qui a muri. Johns varie ainsi en très peu de numéros les tonalités, et on passe de l'action épique, démesurée et jouissive (et c'est Superman quand même !) à une émotion tout en retenue, où l'on devine les non-dits et les failles internes de l'homme de fer. L'articulation qu'a décidé de faire Urban entre les numéros d'Action Comics et les parties des Annuals 10 et 11 comme autant d'interludes, est sur ce point parfaite et met en valeur toutes les thématiques d'un volume qui se révèle particulièrement dense. Encore une fois du très bon boulot éditorial. 

Un point sur les dessins d'Adam Kubert (Action Comics #844-846, #851) : moi je les trouve magnifiques, surtout dans le découpage des cases. Certaines scènes d'actions gagnent soudainement en relief avec un rendu vraiment hallucinant. Après pour les Annual 10 et 11 c'est de bonne qualité, sans être transcendant, disons que je suis moins fan de certaines approches graphiques.

Alors le verdict ? Encore une fois Geoff Johns très performant, une édition aux petits oignons, et en plus c'est très beau. Alors si comme moi vous étiez plutôt néophyte en ce qui concerne Superman, cet album ne se boude pas. Rendez-vous le 24 mai au prochain tome avec Eric Powell (!!!) aux dessins.

Entre amis, d'Amos Oz

Retour à la littérature, la grande, la vraie, la noble, en la personne de l'écrivain israélien Amos Oz dont nous parvient en ce début d'année le peu épais Entre amis (Gallimard). Mais bon, à l'instar du baril de lessive, la qualité littéraire ne se mesure pas à la quantité de mots, et une petite dosette bien pensée peut aisément blanchir et rafraîchir votre garde-robe intellectuelle. Ah, l'art de l'introduction....

A la croisée du roman et du recueil de nouvelles (Gallimard publiant effectivement Entre amis sous l'appellation nouvelles), la dernière oeuvre littéraire d'Amos Oz se compose de huit cours récits, mais tous reliés par une même unité de lieu, en l'occurrence le kibboutz Yikhat. Que l'on suive les conversations politiques des hommes dans le réfectoire, les relations amoureuses compliquées entre un trio amoureux improbable, la nuit cauchemardesque d'un petit garçon chétif, la veillée du secrétaire lourde de non-dits sentimentaux, le dernier cours d'un intellectuel mourant, Amos Oz offre autant de points d'entrée dans son petit univers. De manière habile, le lecteur est naturellement amené à faire les recoupements, à relier les différentes indices disséminés dans ces tranches de vie apparemment anodines, pour reconstituer le puzzle humain de ce kibboutz et d'en saisir la nature profonde. 

Le kibboutz possède à ce titre avec le camp, l'asile, le monastère une solidarité thématique. La fermeture, le renfermement, l'isolement ont toujours su fasciner dans la littérature. La privation de liberté et d'espace, la surveillance exercée du fait de la promiscuité, font de ces univers clos une compréhension de ce que sont, en reprenant la terminologie Erving Goffman, les institutions totales où l'individu est une entité niée voire broyée. Ranger le kibboutz dans cette catégorie peut sembler exagéré, mais que le renfermement soit volontaire et subi, les exigences et les contraintes de la vie communautaire restent les mêmes. Une telle métaphore institutionnelle des idéologies totalitaires est bien évidemment un puissant terreau littéraire. Mais Amos Oz, à la manière d'un Dostoïevski dans Les Carnets de la Maison Morte, prend le contrepied de la gravité du sujet. Si, en effet, l'on devine l'ascétisme, les parti-pris idéologiques, les tentatives de refonte de la société inhérents au projet des kibboutzim, et combien cet esprit pionnier n'est pas partagé par tous et qu'ici et là le modèle s'effrite, la profession de foi de l'écrivain est ailleurs. Dans chacune de ces courtes histoires, Amos Oz s'attarde avec sensibilité sur les petits gestes, les attentions, les préoccupations et les sentiments qui relient tout le peuple du kibboutz. A travers ces histoires, parfois tendres, parfois poignantes, la démarche humaniste de l'écrivain israélien s'impose d'elle-même, et nous indique que notre humanité repose partout, dans chaque lieu et à chaque instant, quel que soit l'environnement. 

Cette dernière phrase n'est pas dénuée d'une certaine banalité, mais pourquoi se priver de ce type de plaisir ? Pourquoi se détourner de cette littérature, qui derrière l'apparente simplicité de son style et de ses récits, nous transmet toute cette nostalgie d'une humanité qui tend à se perdre et oublie que son destin se joue parfois sur le palier. A ce titre, Entre amis est incontestablement un très beau texte, digne des plus grands romanciers. 

dimanche 3 mars 2013

New 52 : Bilan de Février (3)

Les Autres Univers  : The Edge et The Dark


Stormwatch #17 (Milligan/Conrad) : 


A chaque occasion où j'ai pu m'exprimer sur Stormwatch, je n'ai jamais pu m'empêcher de me laisser aller à la nostalgie de feu le label Wildstorm. Et encore aujourd'hui, quand il m'arrive de voir ce que sont devenus Apollo, Midnighter, Jack et Jenny, j'ai un pincement au coeur sur le level-down abusé qu'ils ont subi. En plus, on ne peut pas dire que la série version New 52 ait été bien traitée par DC. Cornell (passage rapide), puis Jenkins (passage cours et catastrophique) ont tenté en vain de lancer la série, et Milligan a du jongler avec pas mal d'intrigues en cours sur le titre. Un nouveau passage de témoin qui ne partait pas sous les meilleurs auspices puisque Milligan avait préféré mêlé ses deux séries (Red Lantern et Stormwatch) sans grande logique. Mais à mon tour de faire amende honorable, car cela fait depuis quelques numéros que Milligan nous sort des numéros très convaincants. Non seulement il s'est enfin décidé à travailler son équipe, mais en plus il est en passe de conclure pas mal d'intrigues initiées par Cornell. Concrètement, Milligan joue la carte scénaristique de la division de l'équipe. Un Tanner infiltré avait tenté d'exclure Midnighter, mais la supercherie a vite été découverte. La paix ? Que Nenni, car c'est au tour de l'Ingénieur de péter un câble et de virer psychopathe. Jenny et Jack sont quasiment out, seuls Midnighter et Apollo sont encore capables de mener la résistance. On perd un petit peu de l'esprit Stormwatch (a fortiori, oubliez The Authority) mais au moins l'histoire est bien rythmée et intéressante. En outre, si vous me laissez filer la métaphore, Milligan aura bien rangé le bordel laissé par ses petits camarades pour laisser à son successeur une chambre bien ordonnée. Jim Starlin (qui reprend la série au #19) sera bien heureux de pouvoir utiliser des jouets bien à leur place et débuter son run sur des bases saines. C'est pas la panacée, mais c'est toujours ça de pris. En tout cas j'attends avec une certaine impatience le prochain numéro.

Justice League Dark #16 (Lemire/Fawkes/Janin)


A contrario de Stormwatch, voilà une série qui suit son bout de chemin. Le passage de Jeff Lemire a fait grand bien au titre. En lançant une grande intrigue autour des Books of Magic, Lemire a réussi à faire de Justice League Dark une vraie pierre angulaire de l'univers Dark autour duquel gravitent quasiment tous les personnages de l'univers Dark. En clair, JLD est une vraie série Justice League, et non pas une simple facilité sémantique. A la fin du #15 de JLD, Lemire s'est permis une petite réinterprétation (ce qui est toujours bienvenu) des fameux Books of Magic, pour en faire des portails sur un autre monde. Le #16 ouvre donc l'arc The Death of Magic, nos héros étant perdus dans un univers où la magie a été mis au pas par la science. Lemire et Fawkes (destiné à reprendre la série seul au #20) nous livrent un numéro encore une fois passionnant, et l'on sent parfaitement où nos comparses vont nous mener. La cohérence de l'ensemble est donc appréciable, on attend avec impatience la suite des aventures pour nos héros bien mal embarqués. On comprend en tout cas pourquoi Urban Comics s'intéresse maintenant de près à la série et s'apprête vraisemblablement à la publier en vf. Au niveau des dessins, j'avais auparavant exprimé certaines réserves sur le graphisme de Mikel Janin. Oubliez ce que j'ai écrit, les planches sont magnifiques

New 52 : Bilan de Février (2)

Suite des critiques sur les publications DC pour le mois de février

Univers Justice League


Green Arrow #17 (Lemire/Sorrentino) : 


Non, ce n'est pas la série TV qui m'a incité à me mettre à Green Arrow. Un seul nom m'a suffit : Jeff Lemire, dont j'adore le travail sur Animal Man et Justice League Dark. Et depuis l'expérience Aquaman par Johns, je me dis qu'aucun personnage n'est a priori ridicule ou dénué d'intérêt. Difficile par contre de vous décrire les changements de ton sur la série ou de me prononcer sur la nouvelle direction empruntée par Lemire par rapport à Giffen ou Nocenti. Parce que de manière incontestable, ce numéro se présente comme une rupture dans la série avec un Green Arrow aux abois, malmené de bout en bout, et clairement destiné à repenser son rôle dans Starling City. Lemire joue la carte du début de run version déchéance en accéléré sans trop livrer d'éléments. Une manière efficace (et efficiente) d'appâter le lecteur qui a ainsi une furieuse envie d'en savoir plus. Impossible en somme de se prononcer sur la qualité d'un run qui vient à peine de débuter, mais Lemire pose d'emblée sa pâte sur le titre qui s'annonce prometteur. Un mot sur les dessins de Sorrentino. C'est très particulier, avec une alternance colorisation/noir et blanc qui peut surprendre. Indéniablement cela apporte un cachet sur le titre en le dotant d'une identité propre. Personnellement, je suis convaincu. 

Action Comics #17 (Morrison/Walker/Morales) : 


Heum... C'est extrêmement compliqué de commenter ce numéro. J'aime bien Grant Morrison, ou du moins je me convaincs peut-être que j'aime Grant Morrison. En fait je dois sûrement aimer me sentir stupide à la fin de mes lectures de comics. Il n'y a qu'un numéro de Morrison qui peut vous faire cet effet, on ne peut pas enlever ça au Britannique. Plus sérieusement, on sent que Morrison est en train de boucler son run (plus qu'un numéro), et que tous les éléments ébauchés sont en train de s'assembler :  la Légion des Super-Héros, la destinée héroïque de Superman, la Cinquième Dimension, les Univers Parallèles. Je me répète, je n'ai pas tout compris, mais vous connaissez cette narration particulière de Morrison où l'on jongle d'un univers à un autre, où les phrases semblent absurdes, mais où tout doit cependant faire sens dans le grand plan du scénariste (et impossible pour moi de me prononcer sur sa cohérence). A mon avis, il faudra que je reprenne tous mes numéros d'Action Comics pour réellement apprécier le run de Morrison, ce qui est un tantinet frustrant tout de même.  Donc rendez-vous le mois prochain pour un avis un peu plus construit. Rien à dire sur Morales et Walker, plutôt en forme, et qui rendent service à ce numéro plutôt riche en scènes d'action.

Wonder Woman #17 (Azzarello/Akins/Pinna) : 


Wonder Woman doit être une des plus grandes et bonnes surprises des New 52. La série est une des celles qui a subi le plus de modifications dans cette nouvelle continuité et le fait qu'Azzarello ait quelque peu dissocié sa série du reste de l'univers DC l'a paradoxalement dotée d'une tonalité propre immédiatement identifiable. Depuis le premier numéro, le scénariste mène son héroïne d'une plume de maître et semble parfaitement savoir où aller. Et ce numéro ne fait pas exception. Azzarello développe toutes ses sous-intrigues que ce soit le retour du Premier Né, la relation Zola/Hera (délicieuse en mortelle désabusée), l'arrivée de War et Strife dans l'équation. Autant dire que le numéro est riche, dense, passionnant, à la fois drôle tout en étant bourrin quand il le faut. Vu le cliffangher final, la quête du dernier fils de Zeus va bientôt se terminer, mais les potentialités de la mythologie version Wonder Woman semblent illimitées. Pour le dessin, on alterne (si j'ai bien compris) entre Akins et Pinna (pour les pages consacrées au Premier Né). Dans la continuité du travail effectué, les planches d'Akins contribuent à consolider l'identité de la série et restent extrêmement agréables à la lecture. Un sans faute pour l'Amazone, qui confirme être une des valeurs sûres des New 52.

New 52 : Bilan de Février (1)

Bonnes résolutions pour ce début d'année 2013 pour les futures chroniques de comics.  Concernant la VO, je vais tenter un nouveau format pour garder un certain rythme de publication. Les critiques détaillées vont donc céder le pas à de la chronique de masse mensuelle. Pour ce premier numéro, nous nous intéresserons donc aux séries VO de DC que je continue à suivre. Crossovers obligent, certains titres vont passer à la trappe (Batman #17, Detective Comics #17, Justice League #17, Animal Man #17 et Swamp Thing #17), mais il reste tout de même une petite pelletée de titres à commenter. 

Univers Batman

 

Catwoman #17 (Nocenti/Sandoval) :  


Il est de plus en plus difficile de savoir où va la série depuis pas mal de numéros. Le départ de Winick a fait du dégât, sans parler de la participation obligée à Death of the Family. Bref, Ann Nocenti a du mal à prendre ses marques, a orchestré dans les deux derniers numéros une pénible intrigue autour de la Black Room. Malheureusement ce nouveau numéro ne relève pas le niveau, avec une classique histoire autour d'un vol de tableau. Nocenti tente malgré tout de ramener son héroïne sur de bons rails et ouvre son récit sur une menace que l'on imagine conséquente. En dépit de ses efforts, je trouve que Nocenti nous dépeint une Catwoman un peu trop teenager, ce qui tranche justement avec l'ébauche du personnage par Winick. Par contre, au niveau du dessin, rien à redire Sandoval nous livre de beaux dessins. Pas dit toutefois que je continue à investir sur ce titre qui ne cesse de me décevoir.

Batgirl #17 (Fawks/Sampere) :


Nouvelle équipe sur le titre, avec notamment l'éviction actée et très controversée de Gail Simone sur le titre. Pas de grande révolution, puisque Fawkes marche clairement dans les clous de son prédécesseur. Ce numéro fonctionne presque comme un Aftermath de Death of the Family. Barbara Gordon doit donc gérer le retour de son frère qui lui a déjà joué un vilain tour avec le Joker. On retrouve le Jim Gordon Jr de Sombre Miroir,  en bon sociopathe qui se respecte. Rien de très novateur, mais le numéro se lit bien. Pas dit toutefois que cela suffise pour que je mette à Batgirl... Pour les dessins, j'aime bien ce que fait Sampere, avec un trait assez mature qui donne un rendu plutôt sombre à l'univers de Batgirl.

 

 

 

 

Talon #4 (Tynion IV/March) : 


Il y avait de quoi douter a priori de la pérennité (voire du bien-fondé)  d'un titre spin-off, fruit de la hype autour de Scott Snyder et de sa montée en puissance au sein de DC. Heureusement, Talon nous fait démentir, et sans être la série du siècle, s'impose comme un titre attachant et agréable à lire. Vu que le héros est un ergot renégat, l'action est au rendez-vous, mais Tynion IV n'oublie pas la mythologie de la Cours des Hiboux et profite de sa série pour l'étoffer. Dans ce numéro Calvin Rose est opposé à Félix Harmon, alias le Boucher de Gotham, un des ergots psychopathes réveillé in extremis par une Cours aux abois. Calvin Rose s'en sort non sans mal, et le numéro s'achève avec un retour promis à Gotham (Oh yeah). Au dessin sur Talon, March est en forme, donc c'est beau et son trait sert parfaitement la tonalité de la série.

 

 

Batman The Dark Knight #16 (Hurwitz/Van Sciver) : 


Je m'étais juré d'arrêter BTDK car la série pataugeait depuis quelques numéros. Laissé à l'abandon par ses scénaristes, BTDK semblait même voguer en dehors de la continuité New 52. Conscient des failles patentes du titre à l'écriture,  DC a appelé à la rescousse l'écrivain Gregg Hurwitz pour conclure (et pas forcément de manière convaincante) l'arc sur Scarecrow. Autant dire que c'est presque un miracle pour ma part d'avoir acheté ce nouveau numéro (je ne me l'explique pas encore). Et grand bien m'en a pris, car Hurwitz signe un grand début d'arc. Voilà donc l'arrivée du Mad Hatter (Le Chapelier Fou) dans les New 52, et niveau flippe, le nabot n'a rien à envier au Joker. Hurwitz n'oublie pas Bruce Wayne en route et signe des dialogues efficaces pour souligner les déboires sentimentaux et émotionnels de son protagoniste. Au dessin, Ethan Van Sciver remplace David Finch (parti sur la nouvelle série JLA), et il n'y a pas de quoi regretter ce changement. Le dessin est superbe, sa vision du chapelier est excellente et certaines planches sont particulièrement bien pensées. L'esprit Dark Knight est présent dans tout le numéro, bref que du bonheur. C'est incontestablement mon coup de coeur de Février. Bref, s'il faut essayer BTDK, l'opportunité est trop belle pour ne pas la saisir.


A bientôt pour la suite des bilans.

samedi 2 mars 2013

IL, de Derek Van Arman

Lorsque l'hiver s'attarde dans le Sud de la France et que de surcroît cette rentrée littéraire 2013 a bien du mal à vous emballer, deux solutions vous guettent : s'en remettre aux classiques ou bien s'enfiler un bon polar. Et pourquoi ne pas allier les deux grâce à Sonatine ? Alors certes, l'argument de vente du "Attention roman culte à l'auteur poursuivi par le FBI pour cause de roman trop réaliste" peut sembler un poil exagéré, mais ce n'est pas une raison de ne pas s'intéresser à Il, de Derek Van Arman, publié en 1992 aux Etats-Unis et jusqu'ici inédit en France.

Il se situe dans la tradition des romans policiers sur les tueurs en série. Derek Van Arman lui décide de faire les choses en grand en mettant en scène plusieurs tueurs en série en activité dans le même roman. C'est d'ailleurs une série de meurtres/disparitions dans l'Est des USA qui déclenchent les différentes enquêtes menées par Jack Scott, profiler en chef d'une cellule fédérale spécialement chargé des tueurs en série. Et là où Derek Van Arman va décidément plus loin, c'est qu'il ne se borne pas à guider le lecteur au prisme des seuls enquêteurs, mais nous offre aussi le point de vue des T-Recs (les tueurs récréatifs) en chasse de leurs victimes. L'écrivain brouille ainsi les statuts de ces personnages, les traqueurs devenant tour à tour les traqués. Difficile toutefois de vous offrir un résumé digne de ce nom car Il reste un roman particulièrement dense (plus de 760 pages) et que l'écrivain a manifestement décidé de soigner son intrigue et ses personnages, en brassant plus de 150 ans d'histoire autour d'une bourgade anodine. 

A propos de ces derniers, l'écrivain joue la carte de la sécurité notamment pour les policiers avec lesquels il compose un duo relativement classique du roman policier. D'un côté le fameux Jack Scott, vieil expert des tueurs en série, cultivé, ayant la sagesse de son âge. De l'autre Franck Rivers, policier d'état impulsif, grande gueule, réfractaire à toute autorité, mais tout aussi intelligent. Le maître et son improbable disciple, mais qui nouent au fil de l'enquête une relation où s'entremêlent affection, respect et amitié. Un type de duo relativement éprouvé, mais diablement efficace, notamment sous la plume de Van Arman très à l'aise avec son couple auquel le lecteur s'attache rapidement. Là ou il prend plus de risque c'est avec ses personnages de tueurs, en dépeignant leurs interactions spéciales, leur froide appréhension de leur environnement, tout en ne cédant pas à l'erreur de la "déshumanisation" à outrance.

L'univers d'Il est de fait un monde sombre, inquiétant, peuplé d'êtres dangereux aux connections troubles. Un univers d'autant plus oppressant qu'il côtoie sans prévenir celui des gens ordinaires et que le basculement de l'un à l'autre se fait sans transition, entraînant sans prévenir les innocents en enfer. Pas besoin de faire dans la surenchère de scènes gores, car Van Arman ne cède que très peu à l'artifice de l'hémoglobine, pour privilégier l'étude détachée des désaxés et de leurs psychologies anormales. Il faut aussi avouer Sonatine ne nous aura pas survendu son roman, car effectivement Il se pose comme une enquête particulièrement immersive du fait de la précision des techniques d'investigation et de ses descriptions soignées.

Vous l'aurez aisément deviné, Il est un très bon roman policier, qui satisfera sans aucun doute les amateurs du genre. Il fait même plus que remplir tranquillement son cahier des charges en prenant son temps et en s'intéressant en détail à chacun de ses personnages, pour proposer une enquête fouillée, convaincante et bien écrite.

Death of the Family

Death of the Family : Batman #13-17, Batgirl #13-16, Catwoman #13-14, Suicide Squad #14-15, Batman and Robin #15-16, Nightwing #15-16, Detective Comics #15-16, Red Hood and the Outlaws #15-16, Teen Titans #15-16

On continue notre petit tour des crossovers, avec ce qui aura été vendu comme LE blockbuster DC en 2013. Côté marketing, on ne pourra pas dire que l'éditeur n'a pas fait son travail. Pendant plus d'un an, l'univers Batman a été sevré de son bad guy le plus emblématique ; une allusion directe à un des épisodes les plus sombres de l'histoire du Caped Cruisader (Death in the Family) ; la quasi-totalité de la Bat Family mobilisée autour du retour du Joker pour un total de 23 numéros ! Rajoutons à ce tableau un Scott Snyder unanimement célébré pour l'ensemble de l'arc des hiboux (Batman 1-12 + Batman Annual 1), autant dire que les attentes étaient immenses. 

Je resterai relativement succin sur l'intrigue qui tient finalement en très peu de numéros (cinq). Le Joker revient à Gotham avec une idée fixe : Batman se ramollit, comme en atteste ses difficultés éprouvées face aux hiboux et leurs ergots. Le bouc-émissaire est tout de suite trouvé : c'est la Bat Family. Bien décidé à retrouver la ténacité et la noirceur de son meilleur ennemi, le Joker décide d'une opération radicale : une ablation générale en bonne et due forme (d'où le Death of the Family).Voilà pour un pitch très alléchant sur le papier, mais le contrat est-il rempli pour autant ? Oui et non. Oui car il est indéniable que Scott Snyder est doué et maîtrise l'univers du Chevalier Noir. Plusieurs idées sont ainsi exceptionnelles : le "masque" du Joker, la relation Batman/Joker autour du code dont le héros s'est doté, la scénographie d'Arkham et la mobilisation d'une bonne partie de la galerie des méchants (à ce titre les back-up stories sont particulièrement intéressantes et bien pensées). Du côté du dessin, Greg Capullo est toujours au sommet de son art, et son trait particulier sert réellement ce nouveau Joker et l'ensemble crasseux et dérangeant qui se dégage de Death of the Family.

En revanche, impossible de ne pas tilter sur certains éléments. Que dans le combat final, on envisage une origine familiale ou sociale au Joker ne m'emballe pas. Le Joker a toujours fonctionné comme un avatar ultime du chaos, symbole par excellence de la menace qui pèse sur Gotham et que Batman doit solutionner. L'humaniser c'est incontestablement l'affaiblir, du moins lui enlever toute la force évocatrice d'une vague de violence inexplicable et inexpliquée qui éclabousse l'ensemble d'une ville sans calcul, sans discrimination et sans but. Que Scott Snyder s'en serve pour déstabiliser le Joker est donc doublement problématique. Plus généralement, à la fin de la lecture du Batman #17, impossible de ne pas avoir eu l'impression d'un bon gros pétard mouillé. Cela semble sévère, mais du fait de la contrainte même du crossover mainstream sur une des séries les plus lues de DC, il était évident que Snyder ne pouvait pas aller très loin et si tôt dans la continuité des New 52. Inutile dès lors de dépeindre ou présenter un Joker plus fou que jamais s'il ne fait pas plus qu'à son habitude. Death of the Family est un cas d'école de ce décalage trop criant entre la présentation de l'event et ses conséquences réelles sur l'ensemble des protagonistes.

Un mot sur les tie-in (18 numéros tout de même). Je n'ai pas tout lu, loin de là. Je me suis cantonné à Detective Comics, Catwoman et Batgirl. La présence de Catwoman est presque anecdotique, et surtout l'impact de Death of the Family sur cette série est quasi nul, alors que les deux numéros qui sont consacrés à la chatte étaient presque convaincants. Batgirl, c'est du classique. Gail Simone fait référence aux fameux arcs traumatisants pour Barbara, invite son frère dans la danse. C'est le minimum syndical, mais c'est honnêtement réalisé. La vraie claque vient du Detective Comics. John Layman a repris les rênes de la série depuis le #13 et a initié un arc autour du Pingouin sur fond de coup d'état dans l'organisation. Non seulement Layman a réussi à tisser son arc autour d'un sous-évènement dans Death of the Family, pour ensuite proposer un tie-in particulièrement bien écrit sur une bande de psychos fans du Joker, et sur les conséquences moins clinquantes mais tout aussi dramatiques de l'arrivée du Joker dans Gotham. Un sans faute ! 

Alors comment conclure sur Death of the Family ? Evidemment que c'est un bon crossover avec une atmosphère oppressante, sale, en somme digne du retour du Joker. Mais je ne peux m'empêcher de penser que d'avoir survendu l'event l'aura grandement desservi. Il aurait peut-être fallu faire monter doucement monter la pression sur plus de numéros, ne pas trop promettre au lecteur, ne pas livrer si vite autant de cartes sur un des personnages les plus intéressants de DC. Je suis donc curieux de voir comment Snyder compte rebondir, car en dépit de ses grandes qualités, Death of the Family sonne curieusement comme le premier faux pas du brillant scénariste.



Throne of Atlantis

Après une très longue absence sur ce blog, je me décide finalement à reprendre du clavier en profitant notamment d'une actualité on ne peut plus brûlante dans l'univers du comics. On ne s'intéressera pas ici au relaunch de Marvel (il y aurait pourtant à écrire), mais plutôt à un mois de février estampillé "Crossover" chez la Distinguée Concurrence. Il n'aura en effet guère échappé aux spécialistes que pas moins de cinq crossovers se sont ainsi achevés : Throne of Atlantis, Rise of the Third Army, Death of the Family, Rotworld et H'el on Earth. L'heure du bilan a sonné (et d'autre sites ont déjà donné le la en la matière), et à tout seigneur tout honneur, commençons par le crossover 100% Geoff Johns. 


Throne of Atlantis : Aquaman #14-16, Justice League #15-17

Le crossover avait initialement de quoi surprendre (Justice League et Aquaman dans un même crossover !!) mais ce rapprochement fait finalement sens. Un sens qu'il ne faut pas trop chercher du côté de la Justice League, une série dont on a du mal à discerner la direction empruntée jusqu'ici par son scénariste, et qui, paradoxalement, emballe plus par sa back-up story (SHAZAM !) que par son casting XXL. A contrario, force est de constater que Throne of Atlantis parachève tout le travail de Geoff Johns sur Aquaman (the Trench, Black Manta, le sceptre d'Atlantis, la quête identitaire d'Arthur) et conclut de belle manière un effort de réhabilitation d'un personnage auparavant décrié. Certes Brightest Day est déjà un exemple d'une utilisation brillante d'Arthur et Mera dans un event, mais Aquaman est ici au centre du crossover, un modus operandi habituel chez Johns pour pérenniser l'aura de ses personnages dans le paysage DC (Blackest Night/Brightest Day pour Green Lantern, Flashpoint pour Flash).

Comme écrit plus haut, on retrouve dans le crossover tous les éléments subtilement amenés dans les numéros précédents d'Aquaman. Un mystérieux personnage doté du sceptre royal libère une armée venus des profondeurs, tandis qu'Atlantis est bombardée par des missiles humains. La réaction des Atlantes ne se fait guère attendre et la côté Est des Etats-Unis est ravagée par l'ost marin mené par Orm, roi d'Atlantis et frère d'Arthur. Face à ce déchaînement de violence, la Justice League ne reste pas inactive, et la contre-attaque ne s'annonce pas moins violente. Nous sommes bien en présence d'un blockbuster comme on en attend : ça fight sévère sur cinq numéros, on a notre lot de renversements de situations et bien sûr une bonne vieille trahison pour donner un côté tragédie grecque à l'ensemble. Geoff Johns est un vieux routier des crossovers, et autant dire qu'il reste toujours aussi efficace tant le rythme est rondement mené, avec un savant équilibre d'action/dialogues, avec une conclusion qui laisse cet arrière-goût dans la bouche de ces guerres inutiles qui ont laissé des traces chez nos protagonistes. 

Ce dernier point est important et rehausse encore les mérites scénaristiques de Geoff Johns. Non seulement Throne of Atlantis aura été préparé depuis très longtemps, non seulement il s'avère particulièrement agréable à la lecture, mais en plus il se permet le luxe d'offrir des perspectives alléchantes et conséquentes sur les deux séries mises à contribution (Aquaman et Justice League) tout en s'ouvrant sur une troisième série (Justice League of America). Devant tant de cohérence, on ne peut que tirer son chapeau devant le travail d'écriture. 

Un dernier mot sur les dessins. Bon et bah c'est très beau. Ivan Reis est tout simplement LE dessinateur qu'il fallait pour la Justice League (bien plus inspiré que Jim Lee à mon avis), et Pelletier (remplaçant de Reis sur Aquaman depuis le #15) nous montre qu'il est loin d'être un manchot et que sa contribution sur Aquaman sera de grande qualité. 

Quitte à me répéter, Throne of Atlantis est un très bon crossover qui marque indéniablement un tournant pour Aquaman et Justice League. Je suis d'ailleurs curieux de voir comment Urban Comics va adapter ces six numéros dans le kiosque (DC Saga HS 1 ?) et en librairie. Une dernière chose sur une vilaine rumeur qui a circulé sur le départ de Johns de la série Aquaman. En l'absence de confirmation officielle de la part de DC, j'espère que cela restera lettre morte, et que Johns nous offre in fine un run comparable à ses travaux sur Flash ou les Teen Titans (à défaut de Green Lantern).