samedi 2 mars 2013

Death of the Family

Death of the Family : Batman #13-17, Batgirl #13-16, Catwoman #13-14, Suicide Squad #14-15, Batman and Robin #15-16, Nightwing #15-16, Detective Comics #15-16, Red Hood and the Outlaws #15-16, Teen Titans #15-16

On continue notre petit tour des crossovers, avec ce qui aura été vendu comme LE blockbuster DC en 2013. Côté marketing, on ne pourra pas dire que l'éditeur n'a pas fait son travail. Pendant plus d'un an, l'univers Batman a été sevré de son bad guy le plus emblématique ; une allusion directe à un des épisodes les plus sombres de l'histoire du Caped Cruisader (Death in the Family) ; la quasi-totalité de la Bat Family mobilisée autour du retour du Joker pour un total de 23 numéros ! Rajoutons à ce tableau un Scott Snyder unanimement célébré pour l'ensemble de l'arc des hiboux (Batman 1-12 + Batman Annual 1), autant dire que les attentes étaient immenses. 

Je resterai relativement succin sur l'intrigue qui tient finalement en très peu de numéros (cinq). Le Joker revient à Gotham avec une idée fixe : Batman se ramollit, comme en atteste ses difficultés éprouvées face aux hiboux et leurs ergots. Le bouc-émissaire est tout de suite trouvé : c'est la Bat Family. Bien décidé à retrouver la ténacité et la noirceur de son meilleur ennemi, le Joker décide d'une opération radicale : une ablation générale en bonne et due forme (d'où le Death of the Family).Voilà pour un pitch très alléchant sur le papier, mais le contrat est-il rempli pour autant ? Oui et non. Oui car il est indéniable que Scott Snyder est doué et maîtrise l'univers du Chevalier Noir. Plusieurs idées sont ainsi exceptionnelles : le "masque" du Joker, la relation Batman/Joker autour du code dont le héros s'est doté, la scénographie d'Arkham et la mobilisation d'une bonne partie de la galerie des méchants (à ce titre les back-up stories sont particulièrement intéressantes et bien pensées). Du côté du dessin, Greg Capullo est toujours au sommet de son art, et son trait particulier sert réellement ce nouveau Joker et l'ensemble crasseux et dérangeant qui se dégage de Death of the Family.

En revanche, impossible de ne pas tilter sur certains éléments. Que dans le combat final, on envisage une origine familiale ou sociale au Joker ne m'emballe pas. Le Joker a toujours fonctionné comme un avatar ultime du chaos, symbole par excellence de la menace qui pèse sur Gotham et que Batman doit solutionner. L'humaniser c'est incontestablement l'affaiblir, du moins lui enlever toute la force évocatrice d'une vague de violence inexplicable et inexpliquée qui éclabousse l'ensemble d'une ville sans calcul, sans discrimination et sans but. Que Scott Snyder s'en serve pour déstabiliser le Joker est donc doublement problématique. Plus généralement, à la fin de la lecture du Batman #17, impossible de ne pas avoir eu l'impression d'un bon gros pétard mouillé. Cela semble sévère, mais du fait de la contrainte même du crossover mainstream sur une des séries les plus lues de DC, il était évident que Snyder ne pouvait pas aller très loin et si tôt dans la continuité des New 52. Inutile dès lors de dépeindre ou présenter un Joker plus fou que jamais s'il ne fait pas plus qu'à son habitude. Death of the Family est un cas d'école de ce décalage trop criant entre la présentation de l'event et ses conséquences réelles sur l'ensemble des protagonistes.

Un mot sur les tie-in (18 numéros tout de même). Je n'ai pas tout lu, loin de là. Je me suis cantonné à Detective Comics, Catwoman et Batgirl. La présence de Catwoman est presque anecdotique, et surtout l'impact de Death of the Family sur cette série est quasi nul, alors que les deux numéros qui sont consacrés à la chatte étaient presque convaincants. Batgirl, c'est du classique. Gail Simone fait référence aux fameux arcs traumatisants pour Barbara, invite son frère dans la danse. C'est le minimum syndical, mais c'est honnêtement réalisé. La vraie claque vient du Detective Comics. John Layman a repris les rênes de la série depuis le #13 et a initié un arc autour du Pingouin sur fond de coup d'état dans l'organisation. Non seulement Layman a réussi à tisser son arc autour d'un sous-évènement dans Death of the Family, pour ensuite proposer un tie-in particulièrement bien écrit sur une bande de psychos fans du Joker, et sur les conséquences moins clinquantes mais tout aussi dramatiques de l'arrivée du Joker dans Gotham. Un sans faute ! 

Alors comment conclure sur Death of the Family ? Evidemment que c'est un bon crossover avec une atmosphère oppressante, sale, en somme digne du retour du Joker. Mais je ne peux m'empêcher de penser que d'avoir survendu l'event l'aura grandement desservi. Il aurait peut-être fallu faire monter doucement monter la pression sur plus de numéros, ne pas trop promettre au lecteur, ne pas livrer si vite autant de cartes sur un des personnages les plus intéressants de DC. Je suis donc curieux de voir comment Snyder compte rebondir, car en dépit de ses grandes qualités, Death of the Family sonne curieusement comme le premier faux pas du brillant scénariste.



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