lundi 19 mars 2012

New 52 : la suite de la critique (Aquaman, BTDK, Action Comics)

Nouveau billet, et nouvelle critique des comics liés à l’univers des New 52 depuis le relaunch de septembre dernier. Alors, cette fois-il faudra être un peu plus spéculatif et imaginer que les séries que je vais aborder seront effectivement éditées en librairie par Urban comics (François Hercouët avait d’ailleurs plus ou moins lancé des pistes lors des premiers entretiens qu’il avait accordés). Je traiterai donc d’Aquaman, Batman : The Dark Knight et d’Action Comics.

Aquaman (#1-6)

Ah…Aquaman ! Dans mon esprit Aquaman restera toujours plus ou moins lié au préservatif dans une fameuse scène du film 40 ans toujours puceau. Enfin disons qu’il part d’assez loin, et que le grand architecte de l’Univers DC, Geoff Johns, avait fort à faire avec le personnage. Il faut cependant confesser que Johns témoignait d’une sympathie assez forte pour Aquaman dans l’event Brightest Day, qui agissait déjà comme une réhabilitation, et qu’Aquaman règne sur une énorme partie du monde dans l’univers parallèle Flashpoint

L’histoire d’Aquaman démarre à Amnesty Bay alors qu’Aquaman et Mera vivent une vie de couple paisible dans une coquette maison isolée sur une falaise. Une menace (sous-marine évidemment) guette  les habitants du village lorsque des créatures à l’origine inconnue se ruent sur eux, pour les dévorer ou les enlever. Alerté par l’adjoint du shérif, Aquaman et Mera mènent l’enquête et partent à l’assaut de cette espèce belliqueuse. Cette partie du récit concerne les numéros #1-4, les deux autres sont plutôt consacrés aux conséquences de ce qui a été découvert sous les mers, et sur les causes réelles de la disparition d’Atlantis. Le récit de Johns est composé de plusieurs thématiques, la première étant liée à la dimension héroïque d’Aquaman. Johns joue habilement avec le manque de réputation du personnage auprès du lectorat, pour en faire héros raillé, ignoré par la population normale, aussi bien ignorante de sa mythologie intrinsèque (le coup de la ceinture) que le nom de sa femme (que tout le monde ne cesse d’appeler Aquawoman). Ce récit œuvre donc comme une réhabilitation totale du personnage puisque Johns doit aussi bien convaincre le lecteur que les acteurs d’Amnesty Bay. Cependant Johns ne se contente pas seulement de ça, car il lie l’impopularité d’Aquaman à une quête identitaire plus profonde. Aquaman et Mera sont deux personnes qui ont fui leur destinée, et ont fait vœu de protéger un monde auquel ils n’appartiennent pas et qui ne les acceptent pas entièrement. Entre le monde de l’eau et celui de la terre, leurs âmes balancent et sont continuellement questionnées, et Johns transcrit admirablement ce fil du rasoir sur lequel les protagonistes sont placés.

Au niveau du dessin, rien à redire, les planches de Reis et Prado sont magnifiques. C’est classique, du moins ça reste dans les canons actuels des productions DC, mais c’est détaillé et beau. Les poses iconiques sont sublimes, comme les effets d’eau du pouvoir de Mera, donc c’est un sans-faute. 

En conclusion, Johns signe ici une série qui est tout simplement excellente. Je n’attendais rien du personnage, mais le travail est là, et l’empathie joue à fond avec notre couple de héros. Il est vraiment intéressant de constater la capacité de Johns à livrer des séries solides et à varier les différents univers de la maison DC. La seule chose que l’on puisse espérer, c’est qu’il reste aussi longtemps sur Aquaman que sur Green Lantern.

Batman : The Dark Knight (#1-6)

La série BTDK est assez récente, puisque ce nouveau titre a été lancé peu après le Batman : Incorporated de Grant Morrison. son premier arc narratif est d’ailleurs actuellement disponible en version française chez Urban Comics sous le titre Batman : la nouvelle aube. Sachant que ce même éditeur exclue ce titre de son futur magazine Batman Saga, je me disais qu’il serait intéressant de savoir ce qu'il valait. 

L’histoire est assez classique. De nombreux prisonniers d’Arkham se sont (encore) échappés, et il revient au détective masqué de se lancer sur leurs traces. Sa surprise est d’autant plus grande qu’il se rend compte que chacun des super-vilains qu’il rencontre est drogué par un anabolisant développant de manière monstrueuse leur musculature tout en accentuant leur déséquilibre mental. Jenkins a pris d’ailleurs le parti d’orchestrer tout un récit sur la peur, que ce soit via la drogue qui révèle les obsessions les plus enfouies des super-vilains, que dans les rapports qu’entretient Batman avec elle. Il a d’ailleurs recours à beaucoup de monologues intérieurs de Batman, autant de dissertations sur la notion de peur et sur la place qu’elle a occupée dans sa trajectoire individuelle d’orphelin devenu héros. Toutes les critiques que j’ai pues lire sur BTDK ont été catastrophiques, pointant à chaque fois la nullité d’un scénario qui ne comprend rien à Batman et traite par-dessus la jambe son intrigue. C’est un peu exagéré selon moi. Sans être transcendant et souffrant de la présence d’un surdoué sur la série phare (Scott Snyder), l’histoire n’est pas forcément désagréable. C’est un all-star Batman, avec une galerie fournie en nemesis, mais aussi en alliés avec l’apparition de Flash et de Superman. On retrouve ainsi la présence d’éléments, certes peu originaux mais relativement efficaces, de l’univers Batman (les toxines d’Ivy ou de Scarecrow, la haine de Bane) qui font somme toute passer un bon moment de lecture. 

Le site Comicsblog lui avait attribué la sévère note de 2,5/5, en tenant uniquement compte des dessins. Car il est vrai que l’art de Finch est sacrément beau. Un dessin très fin, un character-design très efficace (notamment sur les méchants bodybuildés), une attention très particulière aux formes avantageuses de la gente féminine (notamment une White Rabbit en mode cosplay Playboy), sont les points forts du pinceau de Finch. Le rendu des scènes d’action est donc très convenable, et compense en partie le manque d’originalité du scénario. 

Batman : The Dark Knight, n’est certainement pas la meilleure série des New 52, et peut-être que cela refroidira les ardeurs d’Urban pour une publication vf. Cependant je ne pense pas que ce soit une purge totale, et je dois même avouer avoir préféré ces six premiers numéros à Batman : la nouvelle aube. Pour les lecteurs au budget modeste, je leur conseille de faire l’impasse, mais pas forcément pour les afficionados de Batman, d’autant que BTDK sera aussi mêlé au cross-over sur la Cours des Hiboux.

Action Comics (#1-6)

Après avoir officié si longtemps sur différentes séries de Batman, Grant Morrison profite du relaunch de la DC pour s’attaquer à un autre mastodonte, Superman. Avec un nom si prestigieux sur une série qui a rapidement conquis l’Amérique, il serait étonnant de ne pas voir Urban comics la proposer dans les rayons des librairies françaises. 

Action Comics est une série un peu particulière puisque elle se déroule cinq ans avant dans le continuum de l’univers DC. Il est donc question d’un Superman plus jeune, qui a quitté Smallville depuis quelques temps, puisque Clark Kent est déjà un journaliste dans le Daily Star, concurrent du Daily Planet dans lequel il officiera plus tard et rejoindra Lois Lane ainsi que son ami Jimmy Olsen. Les quatre premiers numéros s’attachent sur la question de la publicisation d’un super-héros, et sur les conséquences sociales, éthiques et sécuritaires que cela implique. Superman se révèle au monde, et loin des lauriers qu’il est censé recevoir, subit une sévère chasse à l’homme, affronte les mécontentements d’une population qui n’est pas prêt à ce genre de défi, tout en la défendant d’une menace cosmique. Grant Morrison varie de manière jouissive les genres et distille les premiers éléments du passé dramatique de Kal-El qui ignore encore tout de son passé et de ses origines. C’est également l’occasion d’introduire son plus grand ennemi, un Lex Luthor aussi dénué de scrupules que dangereux. Les deux autres numéros mettent en scène la Légion des Super Héros et le Superman du futur dans un imbroglio spatio-temporel autour de la navette spatiale qui a amené Kal-El sur Terre. Il s’agit ici de protéger le passé d’un jeune Superman qui n’est pas à son plein potentiel, et en amenant la Kryptonite comme artefact fondamental à la fois de sa survie que de la découverte de son passé et de son héritage. Un mini-arc plus exigeant pour mon anglais imparfait (ce qui est généralement récurrent aux scénarios plus complexes de Morrison), mais qui se raccorde à l’idée d’un Superman qui n’a pas encore tous ses pouvoirs et qui doit peu à peu prendre conscience de sa surpuissance et des responsabilités que cela implique. Des passages souvent obligés dans la gestation archétypale, mais que l’on se régale de (re) découvrir. Il faut ajouter que l’on retrouve à la fin des numéros des mini-récits sur la jeunesse des Kent, souvent empreint d’une nostalgie poignante qui sert bien la série. 

Au niveau du dessin on retrouve  Morales et Bryant sur les quatre premiers numéros, pour un rendu souvent très correct. Certaines cases (surtout dans le premier numéro) sont absolument somptueuses, c’est plus variable dans les autres, surtout au niveau de  l’expression faciale de certains personnages (Lois Lane a parfois de très vilaines moues, sans que l’on sache si c’est intentionnel de la part des dessinateurs). Ensuite on retrouve le grand Andy Kubert, pour un résultat classique, à savoir très correct mais rarement transcendant. Moins aléatoire que Morales et Bryant, mais je trouve cela parfois vraiment en deçà. Pour les mini-récits, la qualité du dessin chute sensiblement, mais sans que cela nuise à la lecture, puisque les dialogues compensent largement les défaillances graphiques. 

Action Comics est selon moi une très bonne série que l’on se doit de se procurer,  soit dès à présent en vo en achetant les premiers numéros disponibles ou en attendant le premier TPB. Nul doute qu’Urban publiera cette série, tant sa qualité est évidente, habile mélange d’éclat héroïque, d’interaction humaine et de réinterprétation de la mythologie du kryptonien le plus célèbre du monde des comics.

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