Suite de nos critiques mensuelles des revues Panini avec Iron Man, et en vedette, le nouvel event de Marvel : Age of Ultron.
IRON MAN 3
Iron Man (vol 5) #4-5 : Kieron Gillen/Greg Land
C’est encore double dose ce
mois-ci pour l’homme de fer. Kieron Gillen clôture son arc sur le programme
Extremis. Depuis deux numéros Tony Stark est en goguette pour récupérer le
dit-programme et régler son compte aux spécimens humains infectés. Comme il l’annonce
lui-même, si des psychopathes du calibre de Fatalis ou Crâne Rouge mettaient la
main sur Extremis, autant leur couper l’herbe sous le pied. Ces épisodes qui s’apprécient
comme des one-shots sont autant de variations d’ambiances et de contextes pour
notre écrivain sautillant. Si vous aimez les catacombes et Lovecraft, le #4 est
fait pour vous. Si vous ne jurez que par les intrigues d’astronautes, vous
aimerez le #5. Mais si vous n’êtes pas emballé par ce que fait Gillen sur Iron
Man (comme moi), vous risquez de sévèrement vous ennuyer. Au contraire de Young
Avengers, je trouve que l’humour de l’écrivain sur Iron Man tombe souvent à
plat. Idem pour la caractérisation de Stark en milliardaire égocentrique et
irresponsable, qui pourrait être dans le ton si Gillen ne donnait dans l’outrance
et le surjeu perpétuel. Personnellement, la succession de fanfaronnades m’agace
d’autant que l’action se fait rare. Ce n’est pas en empilant les pires clichés
et les types d’armures que l’on va me convertir au personnage. Seul l’ouverture
finale me fait espérer en un futur, sinon radieux, au moins original (et
raccord avec le reste du magazine) pour le titre. Niveau artistique, je serai
tout aussi sévère avec le travail de Greg Land. Quand le bourrinage mecha
brille par son absence chez Iron Man, qu’est ce qu’il nous reste ? Une
version métrosexuelle tout en sourire bright de Tony Stark. Autant dire que c’est
largement insatisfaisant.
Guardians of the Galaxy (vol 3) #2 : Brian Michael Bendis/Steve McNiven/Sarah Pichelli
C’est un des transferts de l’année dans
le championnat Marvel NOW, mais le moins que l’on puisse c’est que l’équipe des
Gardiens de la Galaxie ne va pas se plaindre de l’arrivée de la star Bendis. La
nouvelle direction prise est toujours aussi intéressante et ce n’est pas ce
nouvel épisode qui frise la perfection qui va me démentir. Si l’action
démesurée faisait la force du cosmique des Giffen, Abnett et Lanning, Bendis a
décidé d’affiner le monde impitoyable de la galaxie. Que le lecteur se rassure,
l’action domine toujours dans la série et l’on dévore littéralement l’affrontement
des GOG et des forces d’invasion Badoon. Le découpage est parfait, le rythme
est trépidant, les dialogues savoureux. Mais là où l’épisode marque
indéniablement des points, c’est dans la description des enjeux
intergalactiques. Il restait quelque part une zone d’ombre dans la continuité
Marvel, à savoir pourquoi toutes les races et autres entités peuplant l’univers
en veulent autant à notre planète. Ce géocentrisme a d’autant plus de quoi
surprendre alors que la Terre est toujours divisée et ne constitue pas en soi
une menace impérialiste a contrario des Kree et autres Shi’ar. C’est un petit
peu le sujet de la réunion que convoque le roi de Spartax. Les réponses que
donnent alors Bendis sont satisfaisantes en appuyant sur le caractère
chaotique, imprévisible, perturbateur de la race humaine. Conséquence :
loi spatiale de neutralité sur la Terre qui devient une zone de non-intervention.
Un statu quo qui ne saurait toutefois guère durer, que ce soit au regard des
ambitions des grands peuples cités ou encore des propres actions de nos
Gardiens toujours aussi réfractaires à l’autorité, fût-elle interstellaire.
Tout ceci est donc de très bon augure pour le futur de la série. Si en plus
McNiven et Pichelli se surpassent au dessin, on s’incline et on profite à fond
de cette nouvelle version du cosmique.
Nova (vol 5) #3 : Jeph Loeb/Ed McGuiness
Preuve que le cosmique se porte
bien chez Marvel, Nova continue sur sa très bonne lancée, et l’on prend
toujours autant de plaisir à suivre le jeune Samuel qui découvre ses nouveaux
pouvoirs. Si l’on a l’âme pinailleuse, on pourrait dire que Jeph Loeb n’est pas
très original et enquille les passages obligés. Mais si l’on est honnête, il
faut avouer qu’il s’en sort à merveille. Au menu de ce numéro : une scène très
amusante entre Nova et le Gardien (dont on apprend qu’il peut sourire, ce n’est
pas rien), mais aussi un entraînement musclé avec Rocket Racoon et Gamorra, et
une première mission spatiale pas piquée des hannetons qui se conclut sur un
cliffangher qui a de quoi faire frémir. Loeb est toujours aussi à l’aise pour
se mettre dans la peau d’un adolescent et concocte ce même coktail gagnant
entre innocence de la jeunesse et sérieux des enjeux exposés. Rien à dire non
plus sur son vieux compère aux dessins, sinon que McGuiness est très inspiré et
parvient à nous faire décoller aux côtés de Nova. Mission accomplie donc.
Fantastic Four (vol 4) #3 : Matt Fraction/Mark Bagley
Matt Fraction a décidé d’enlever le
frein à main et envoie enfin la famille Richards dans l’espace. L’ensemble du
numéro est donc consacrée à la première aventure temporelle des 4 Fantastiques.
Ce n’est pas désagréable, l’idée de planète-leurre est plutôt bonne, l’action
est au rendez-vous, l’imagerie des pionniers est bien retranscrite, bref on ne
baille pas trop à la lecture, ce qui serait presque un exploit vu les standards
fractioniens. Par contre difficile de se prononcer sur la qualité globale de l’arc
vu qu’il faudra attendre un bon paquet de revues avant d’avoir une idée plus
objective sur la vision de l’écrivain. Aux dessins, Mark Bagley fait le job, ni
plus ni moins, c’est pas mal sans être transcendant.
Bilan de la revue : mon
constat est peu ou prou le même que le mois dernier. Iron Man m’énerve, les
deux séries cosmiques me passionnent. Reste les Fantastic Four, à mon avis le
facteur X de cette revue.
AGE OF ULTRON 1
Drôle de destinée qu’aura connue
ce nouvel event Marvel. Arrivé sur la pointe des pieds, teasé par le bout des
doigts comme si l’éditeur américain avait honte de son blockbuster, misant
plutôt sur l’estival Infinity, Age of Ultron ne partait donc pas sous les
meilleurs auspices. Il faut aussi resituer la conception d’Age of Ultron,
annoncé quelques mois après le lancement de Marvel NOW sans clairement se positionner
dans la continuité puisqu’aucune série estampillée NOW n’avait sinon préparé, du
moins fait office de prologue. Des symptômes inquiétants puisque Marvel nous
avait jusqu’ici habitué à la grande pompe promotionnelle. Pourtant sur le
papier, rien que l’équipe annoncée a de quoi faire frémir. Vieux routier de l’event,
c’est Bendis qui est à la manœuvre. Rien d’extraordinaire a priori, mais au
moment où Age of Ultron sort, l’écrivain chauve est au sommet de son art et
toutes (je dis bien toutes) ses séries du moment sont des hits (Ultimate
Spiderman, Uncanny X-Men, All-New X-Men et Guardian of the Galaxy). Mais
surtout, c’est le retour aux grandes affaires d’un Bryan Hitch qui se faisait
depuis quelques temps désirer. On ne peut pas dire que le génial dessinateur se
soit trop foulé lors de ses dernières collaborations faisant donc d’Age of
Ultron le coup de fouet dont il avait
besoin.
Je vous épargnerai un long
discours sur les events, qui ont surtout le don de décevoir un lectorat qui
attend peut-être trop de ces grandes productions. Rappelons donc simplement que
ce type de récit doit rompre avec la routine super-héroïque et vous en mettre
plein la tronche le temps d’une histoire qui sort du commun. Vérifions donc si
Age of Ultron remplit (le début de) son contrat.
Age of Ultron #1 : Brian Michael Bendis/Bryan Hitch
Point de suspense superflu,
Bendis signe à mon avis un premier numéro qui tutoie la perfection. Dès la
première double-page l’ambiance d’Age of Ultron est posée. La vue panoramique
sur des immeubles en ruine surplombé par les réacteurs d’un immense vaisseau
spatial agit comme une immersion immédiate dans l’univers post-apocalyptique de
l’event. Pour ceux qui s’intéressent aux séries mutantes, le genre du
post-apocalyptique sur fond de résistance à une autorité totalitaire et
oppressante n’est pas si originale. Remender avait ramené X-Force dans l’âge d’Apocalypse,
dont Lapham avait tiré un spin-off du même nom. Cependant Bendis prend à
contre-pied le script et le style de Remender et se situe dans un registre
auquel il ne nous avait guère habitués. Dans ses plus grands runs (citons
notamment Daredevil, Ultimate Spiderman), l’écrivain s’impose par un art
magistral du dialogue par lequel il travaille en profondeur les personnages qu’il
aime. Selon les standards de Bendis, ce premier numéro est finalement peu
bavard et la plupart des lignes de dialogues tiennent plus du cri, d’une
extériorisation émotionnelle bien loin des discours léchés qu’il affectionne
tant. Bendis fait ainsi entièrement confiance aux images qu’il invoque et à la
puissance symbolique qui s’en dégage. Les moments de bravoure s’imposent à nos
yeux, que ce soit cette incroyable séquence de sauvetage de Spiderman, l’arrivée
de l’armée d’Ultron tels les anges noirs semant destruction et désespoir. Que
dire de cette image bouleversante qui clôture le #1 et qui démontre qu’un plan
bien pensé peut aisément supplanter la meilleure des argumentations. Si je
vante à ce point l’impact visuel de l’épisode, c’est que l’artistique est à un
très haut niveau. Oui, réjouissons-nous du retour de Bryan Hitch. Certes, cela
n’atteint pas les plus belles pages d’Ultimates, voire de The Authority (à
supposer qu’Hitch retrouve un jour ce niveau), mais dieu que cela reste beau et
sombre. Que ce soit dans les paysages décharnés ou dans les corps maltraités de
nos héros, le dessinateur est inspiré, cela se sent et impacte le plaisir de
lecture.
Age of Ultron #2 : Brian Michael Bendis/Bryan Hitch
Après une telle introduction, la
suite risque forcément de décevoir. S’il n’atteint pas la même intensité (mais
peut-il en être autrement), cet épisode reste toutefois d’excellente facture.
Bendis poursuit plusieurs pistes, qui sont payantes. Tout d’abord il insiste
sur un duo de survivants en la personne de Black Widow et Moon Knight. En
investissant une ancienne planque de Nick Fury, l’écrivain assure ainsi un
passage de témoin symbolique qui est bien pensé, tout en contrepoint de la bad
ass attitude d’un Hawkeye
particulièrement jouissif. Il faut d’ailleurs constater que dans Age of Ultron,
Bendis met en avant ses personnages préférés, à savoir les héros urbains
généralement dénués de très (trop) grands pouvoirs, et qui sont in fine les
meilleurs représentations du courage et du dépassement de soi, en somme les
avatars les plus crédibles de la résistance humaine. L’event se déplace ensuite
dans l’underground New-Yorkais autour du debriefing de Spiderman. L’artifice
narratif est là encore efficace puisqu’il permet de faire assez rapidement le lien
entre la continuité de Marvel NOW et Age of Ultron et de comprendre comment on
en est arrivé là. Un petit mot sur la conclusion de ce #2, qui répond
directement à celle du #1. Renversement d’image et donc de symbolique, qui
paradoxalement arrive peut-être un peu trop vite. Les blessures physiques ou
mentales auraient pu perdurer un poil plus longtemps pour souligner l’atterrement
ou le découragement de certains personnages suite au soulèvement de la Machine.
Un petit mot sur la livrée de Bryan Hitch. Dans la lignée du premier numéro,
cela reste beau, avec de très belles pages, en particulier ce panorama qui magnifie
la première offensive d’Ultron sur Manhattan.
Bilan de la revue : après
deux numéros pour le moins réussis, je ne peux que conseiller la lecture d’Age
of Ultron. Voilà un event qui pour l’instant séduit par son ambiance doucement désespérée,
le choix des héros mis en avant, et les promesses que l’on est désormais en
droit d’attendre. Ah, si seulement on pouvait avoir plus de pages pour 4,10
euros…
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire