Que dire à propos de ce bon vieux
mois d’octobre ? La rentrée littéraire se tasse, les prix bientôt tomberont
au rythme des feuilles jaunies de platanes rougeoyants, tandis que de gros
barbus joufflus vêtus de carmins vêtements s’apprêtent (déjà) à peupler nos
supermarchés. La routine somme toute, tout comme nos bilans mensuels des
publications Panini. Allez, place aux revues « Avengers ».
UNCANNY AVENGERS 5
Uncanny Avengers #5-6 : Rick
Remender/Olivier Coipel/Daniel Acuna
Double dose d’Uncanny Avengers (à
la place d’A+X, oh yeah !) ce mois-ci, et on ne va pas s’en plaindre. Après
avoir conclu son arc d’introduction avec ce grand méchant nazi pro-humain de
Crâne Rouge, il était temps de voir comment Remender allait redonner un second
souffle à cette publication symbole de Marvel NOW. Dans l’épisode #5, l’écrivain
pose clairement son récit et met entre parenthèses (encore que) l’action
jusque-là dominante. Et bien lui en a pris, car il fait le choix de creuser ses
personnages et surtout la spécificité de cette division unitaire des Avengers
(l’appellation officielle ou institutionnelle du groupe). Cela lui permet de
discourir (et plutôt bien) sur des blessures qui ne sont pas fermées (Malicia,
Xavier, La Sorcière Rouge), mais aussi sur les difficultés d’un groupe de
super-héros à assurer sa pérennité, que ce soit sur le plan financier (refus de
toute aide gouvernementale) ou le plan médiatique (doit-on se cacher ou pas).
En somme Remender s’intéresse à l’identité de son groupe et sur la personnalité
de son leader (fort beau discours d’Havok). Cela dit, la présence de la guêpe
et Wonder Man m’a un peu surpris. Je croyais que la première était toujours
morte, tandis que le second refusait toute participation à une initiative
Avengers. Du coup j’ai eu sérieusement l’impression d’avoir raté un chapitre,
ce qui, je suis sûr, n’aura pas perturbé le lecteur plus assidu que je ne l’ai
été ces derniers mois. Un petit mot sur
l’autre épisode Uncanny Avengers du mois. Malgré un cliffangher comme on les
aime dans le #5, Remender embraye sur un arc qui n’a rien à voir, mais vraiment
rien du tout. J’imagine que l’on part sur l’introduction de la nouvelle menace,
mais pour ma part je suis un peu partagé sur le voyage temporel et dimensionnel
qu’entreprend Apocalypse (sur conseil de Kang le manipulateur). Ok ça se frite
plutôt bien avec un jeune Thor (l’occasion d’emprunter quelques joujoux à Jason
Aaron), mais c’est un petit peu obscur. Remender reste en terrain connu
(souvenez-vous de son Apocalypse et les 4 chevaliers dans Uncanny X-Force), et
espérons qu’il saura amener tous ces éléments à bon port. Un dernier mot sur
les dessins. Remender est d’abord associé à Coipel. Ses planches sont toujours très
convaincantes (à l’exception de certains visages un peu bâclés, notamment ceux
de Wanda sur certains plans). Ensuite, c’est un vieux compère d’Uncanny
X-Force, Daniel Acuna, qui s’invite sur le titre, et c’est pas mal du tout.
Avengers Arena #5 : Denis Hopeless/Kev
Walker
Comme pour les précédents
numéros, Hopeless la joue sensiblement stesso
modo. D’un côté il travaille le back d’un des jeunes protagonistes, et de l’autre
il avance dans son récit. L’avantage de ce modus
operandi c’est de raviver les
mémoires sur les jeunes héros et héroïnes qui ne nous ont pas toujours laissés
un souvenir impérissable et de les rendre immédiatement intéressants. C’est au
tour de Kid Britain de bénéficier de ce traitement de faveur et il faut rendre honneur
au talent d’Hopeless. Déjà que je me contrefiche de Captain Britain, alors une
version jeune et arrogante venue d’une autre dimension, vous vous doutez bien que je m'en tamponne les amygdales … Mais non, dans le contexte de l’univers
meurtrier d’Avengers Arena, la mayonnaise prend, et notre héros, s’il est un
peu con-con, n’en est pas moins sincère et pas si monolithique que ça. Et l’histoire
avance. Pas trop, mais un peu quand même. Hopeless lâche une info, pas deux,
mais elle permet de faire tomber quelques masques. Mais rassurez-vous lectrices
et lecteurs, Arcane revient et annonce qu’il faut désormais accélérer les
choses. J’espère qu’Hopeless saura l’entendre et se décide enfin à se lâcher.
Rien à dire sur Kev Walker, qui est le gars qu’il fallait mettre sur le titre.
Pas le plus beau trait du marché, mais le plus adapté à l’univers.
Bilan de la série : la revue
fournit toujours un excellent moment de lecture. Remender lance de nouvelles
pistes, Arena Avengers est toujours aussi intéressant, bref on ne s’ennuie
jamais avec Uncanny Avengers.
AVENGERS 3
Avengers (vol 5) #7-8 : Jonathan
Hickman/Dustin Weaver
Du Hickman pur jus ! Hypnotique,
bavard, ultra SF mais quelque peu hermétique. Rien de nouveau sous le soleil,
mais ces deux épisodes intriguent. Il fallait résoudre le cliffangher du #6, et
Hickman le fait en introduisant de nouveaux acteurs dans la mythologie Marvel.
Voici venus les Bâtisseurs, leurs héritiers vivants dans des stations spatiales
et qui gèrent les superflux de chaque univers. Il y a deux écoles, soit vous
trouvez ça légèrement chipouille, soit vous pensez que ces éléments font sens
dans le multivers. Je pencherais plutôt vers la deuxième option. Disons que si
je ne suis pas transi d’admiration devant l’interprétation hickmanienne du
multivers, j’en salue l’ambition. L’écrivain tente quelque chose de grand,
innove et travaille ses scripts pour ne pas balancer une nouvelle cosmogonie en trois cases à son
lecteur. Revenons sur les conséquences de l’instant blanc, qui si j’ai bien
tout compris, est le résultat de l’effondrement d’un certain nombre de
superflux et la manifestation de la défaillance généralisée du système
multiversel. Plus concrètement, une université explose et un nouvel individu doté de pouvoirs
assez impressionnants surgit sur la Terre 616. Il faut les efforts conjugués de
Captain Marvel, Thor et surtout Hulk pour calmer le malotru, c’est dire du
potentiel du dénommé Starbrand, protecteur planétaire investi de pouvoirs par
les fameuses stations érigées par les Bâtisseurs. Oui, voilà ce qu’il vous faut
accepter. Ça ne convaincra pas tout le monde, mais personnellement j’ai dévoré
les deux épisodes, et le cliffangher du #8 ne va pas entamer mon optimisme. On
sent que Hickman sait parfaitement où il va, et qu’il a des plans assez
impressionnants pour ses Avengers. Exactement ce qu’il fallait pour le titre
phare de Marvel. Aux dessins, c’est au tour de Dustin Weaver de tenir la cadence
infernale du bi-hebdomadaire. C’est pas mal, tantôt ça rappelle du Kubert,
tantôt du Romita Jr (sur certains angles de visages). Bref, le dessinateur ne
démérite pas et livre parfois de bien belles planches.
New Avengers (vol 3) # 4 : Jonathan
Hickman/Steve Epting
Je vais être plus réservé avec
New Avengers. D’ordinaire je suis plus qu’élogieux avec la série, véritable
bonne surprise de Marvel NOW qui a su remettre en selle avec un certain brio le groupe des
Illuminati dans le contexte de la menace générale évoquée dans Avengers. Et
pendant un quart de numéro, la magie fonctionne encore. Les New Avengers
doivent trouver des alternatives pour résoudre les collisions
interuniverselles, et Stark se pointe avec un projet ambitieux et qui dépote.
Ensuite, c’est plus contestable. On n’est pas dans le voyage interdimensionnel
pur et dur, mais Hickman tire les mêmes ficelles déjà éprouvées. Tout va un peu trop vite, les solutions envisagées sont
couchées avec beaucoup de précipitation. Je ressens beaucoup moins la
cohérence et la patience dont fait preuve habituellement Hickman. Donc le trip
avec Galactus m’a laissé de marbre, le fait de mentionner encore les joyaux de
l’infini frise presque la faute professionnelle. Je me dois donc de calmer mes
ardeurs et retrouver un salutaire scepticisme avec Hickman, dont on ne doit pas
oublier qu’il aura réussi à saborder certains de ses runs pourtant débutés sur
les chapeaux de roue. Reste le sérieux de Steve Epting qui illustre toujours
avec autant de bonheur le script de New Avengers. Bref c’est beau et tant
mieux.
Secret Avengers (vol 2) #4 :
Nick Spencer/Luke Ross
Comme quoi, les mois se suivent
et ne se ressemblent pas toujours. Pour une fois j’ai été conquis par la version
Marvel NOW de Secret Avengers. Pour être tout à fait honnête, le numéro du jour
est réussi parce Spencer a tout simplement signé un point.one ou un annual d’Indestructible
Hulk. A l’instar de ce qu’aurait pu écrire Mark Waid, Banner/Hulk sont les
vraies stars de ce #4, de l’identification intellectualo-scientifique de la
menace (les drones d’Iron Patriot) à sa résolution physique (le démastiquage en
bonne et due forme de ces mêmes drones). Pour être encore plus honnête, Spencer
continue de travailler son intrigue sur fond de conflit exacerbé avec une AIM
institutionnalisée, et ça se lit plutôt bien. Je crois peut-être avoir compris
le but de la série. Il ne fallait pas lire ce Secret Avengers comme un Secret
Avengers, mais comme une pure série du Shield, quoique plus mature de son
pendant télévisuel. Du coup, ça passe. Tiens, j’ai tellement passé un bon
moment que je vais être élogieux avec Luke Ross alors que ce dernier n’est pas
au-dessus de toute critique (Banner en mode cancéreux, heum…).
Young Avengers (vol 2) #4 :
Kieron Gillen/Jamie McKelvie/Mike Norton
L’adolescence c’est de la merde !
J’ai enfin capté où voulait en venir ce vieux roublard de Kieron Gillen qui
disserte ironiquement sur ces rapports mielleux/haineux entre des parents dépassés
et une progéniture ingrate. Mais parfois, on balance un mauvais sort, et le
boomerang vous revient méchamment fort en pleine tronche. Intéressons-nous un
peu plus à cet épisode qui tutoie l’excellence. Une action débridée, des
rebondissements à la pelle, des dialogues parfois un peu trop teenagers mais
qui fonctionnent bien, rien à dire. On avance dans l’intrigue de manière
ludique tout en travaillant plutôt bien les caractères des personnages. L’introduction
de Noh Varr est excellente, avec une double page de génie qui montre encore une
fois toute la virtuosité de Gillen dès lors qu’il s’agit de penser ses
planches. Si l’on devait rajouter à cela des poses bien bad ass, un dessin au
poil, on tient peut-être le meilleur épisode du magazine.
Bilan de la revue : toujours
aussi agréable à lire, Avengers n’a pas vraiment de mauvaise série à son
sommaire. Mais ce ne sont pas toujours les mêmes qui sortent du lot. Honorons
cette fois-ci Young et Secret Avengers tandis qu’Hickman continue d’assurer le
taf.
AVENGERS UNIVERSE 3
Avengers Assemble #13 : Sue deConnick/Pete
Woods/Mark Bagley
Rien à faire, j’ai un système d’immunisation
contre le style de Sue deConnick. Et pourtant je vous jure qu’à chaque fois je
retourne vers Avengers Assemble paré des meilleures intentions. Mais dès la
première ligne de dialogue, la légèreté et la désinvolture qui s’en dégagent me
font sortir du récit. Donc voilà, j’ai lu cet épisode, je crois que je vais l’oublier
dans cinq minutes.
Avengers Assemble Annual 1 :
Christos Gage/Cooker/Mayhem/Ross/Deodato/De landrov
Vous allez dire que j’ai
des idées fixes, mais changement d’écrivain, changement d’envergure. L’exercice
de l’annual est à mon avis délicat puisque le one-shot requis par le genre doit
quand même avoir un intérêt pour le lecteur (et si possible justifier ainsi le
surcoût économique en vo). Gage a choisi de ne pas approfondir l’univers de la
série (et on le comprend vu l’indigence des arcs de Avengers Assemble) mais
plutôt de se concentrer sur un personnage, en l’occurrence Vision. Trêve de
suspense, le numéro est de qualité. Cela fait depuis AvX que l’on se dit que
Vision méritait un traitement de faveur pour cerner son (nouveau) comeback dans
la continuité Marvel. Alors comment Gage orchestre tout ça ? L’écrivain
compose une intrigue autour de Suntorion qui tourne berserk et menace de
ravager la multinationale Roxxon. Le drame que vit le bad guy est un parfait
miroir des tourments qui touchent l’androïde. C’est donc sur le plan des
émotions et des sentiments que le numéro se distingue, empreint d’une douce
nostalgie. Pouvait-il en être autrement avec l’état de Vision, privé de sa
femme, oublié de ses amis, à l’identité perdue ? Non, mais Gage ouvre de
fort belle manière son one-shot. Du bon travail d’écriture magnifiquement
illustré par ce casting all-star de dessinateurs dont certaines planches
(notamment celles de Deodato) sont à tomber par terre.
Thor, God of Thunder #4 : Jason Aaron/Esad
Ribic
Le sans-faute comme toujours. Je
vais, une fois n’est pas coutume, être très bref. La geste aaronienne est
magnifique, le trait de Ribic somptueux. La dernière page de ce numéro
symbolise à merveille toute la puissance épique et mythologique qui se dégage
de cette série. L’intrigue avance peu à peu, et l’on comprend comment ces trois
Thor vont être amenés à dialoguer. Parfait, vous disais-je, tout simplement
parfait.
Indestructible Hulk #4 :
Mark Waid/Leinil Francis Yu
Petite innovation avec ce nouvel
épisode de Hulk. C’est le premier qui ne soit pas un one-shot et joue la carte
du cliffangher. On ne va s’en plaindre, car il était peut-être temps que Waid
commence à poser de véritables jalons pour Hulk. Non pas que cet arc s’annonce
impérissable, mais bon un petit conflit entre Terre et Mer ça ne fait pas de
mal. Alors je ne sais pas si Waid a voulu faire un clin d’œil à l’event de la
concurrence, Throne of Atlantis, mais à deux mois d’intervalle, le doute est
permis. Des choses sont assez amusantes, comme la coopération cino-shieldique,
une première pour moi. Bon, pour la finesse géopolitique on repassera (les
gentils chinois, le méchant atlanto-khadafiste), mais il y a du monstre marin,
ça bourrine une peu… En fait la force du numéro tient à l’aspect Banner du
récit. L’introduction est savoureuse
(Bannerville), la présentation de l’équipe parfaite. L’humour est présent, que
ce soit dans les dialogues ou dans la composition des cases (les regards
angoissés des scientifiques après un accès de colère de Banner). Du coup, quand
Hill rappelle son agent, on est un peu frustré que la rencontre soit aussi
brève qu’intense, et l’on attend qu’une chose, que Banner remette les pieds
dans son laboratoire. Pour les dessins, rien à dire, ce que fait Yu est
absolument délicieux. Je vais vraiment regretter son départ quand celui-ci sera
effectif.
Fearless Defenders #3 : Cullen Bunn/Will Sliney
Dire que Cullenn Bunn n’est pas l’écrivain
le plus inspire de l’écurie Marvel est un doux euphémisme. Le problème du
bonhomme est qu’il aligne les miniséries inutiles ou assure des relais
catastrophiques sur des séries, avant son arrivée, très réussies (Wolverine d’Aaron, Venom de
Remender). Bref, c’est pas la joie. Dans ce marasme, Fearless Defenders surnage.
C’est léger, très léger, trop léger, mais la légèreté fait finalement office de
tonalité à une série qui ne brille pas par son pitch (des nanas divines qui
demandent à d’autres nanas pour taper sur des méchantes gonzesses divines et
invincibles). Rajoutez des cuissardes, des soutifs en bronze et des blagues sur
les ragnagnas et voilà l’ambiance doucettement déviante de Fearless Defenders.
Je n’ai rien contre le full féminin (j’en veux pour preuve le X-Men de Brian
Wood) mais bon, j’attends un minimum de caractérisation. Là, le travail en
profondeur sur les personnages consiste à enquiller les bourre-pifs. Mais bon,
on ne s’emmerde pas, c’est déjà ça non ? Pour les dessins, je crois que
Marvel n’a pas osé aller au bout du concept. Mais balancez du Deodato ou du
Frank Cho, que ça se trémousse un peu. Donc, c’est sympa, mais pas c’est pas l’extase
non plus.
Bilan de la revue : toujours
aussi solide grâce aux séries solo, Avengers Universe, est aussi aidée par l’annual
de Avengers Assemble, et Fearless Defenders qui a le mérite de conclure
honorablement le magazine. La vie est belle pour les titres heroes,
réjouissons-nous en.