Suite de cette review des news 52, avec deux séries. Elles
ont un point commun : ce sont toutes des importations du label Vertigo.
Autre point de ressemblance : elles sont susceptibles de connaître une
édition française. Place donc à une fournée de grande qualité avec Resurrection
Man et Animal Man.
Resurrection Man (#1-6)
Au moment du relaunch, je me
souviens avoir rapidement investi dans les premiers numéros des Red Lanterns et
de Stormwatch. A cette époque, DC avait l’habitude de conclure ses fascicules
sur des entretiens avec les équipes créatrices de toutes les séries des New 52.
Les seuls noms d’Andy Lanning et Dan Abnett (les anciens messieurs cosmiques de
Marvel) ainsi qu’un pitch pour le moins alléchant m’avait donc incité à faire
l’investissement.
Difficile de faire un résumé de
ces six premiers numéros, car il n’est pas aisé de trouver une cohérence dans
ce premier arc narratif, qui n’en est pas vraiment un. Nous y suivons les
premiers pas de Mitch Shelley qui s’est dernièrement éveillé au monde en état
d’amnésie complète. La seule chose dont il se rend compte, c’est qu’il est
immortel, du moins qu’il est continuellement rappelé de la mort, avec en bonus
un nouveau super pouvoir à chaque résurrection. Les premiers numéros sont ainsi
l’occasion de le suivre à la recherche de son identité et de son passé.
Certains indices le guident vers une maison de retraite où un vieil homme
affirme connaître son défunt père. Pour compliquer les choses, il est poursuivi
par deux tueuses, physiquement intelligentes et particulièrement balaises,
Maria et Carmen, pour le ramener dans un mystérieux laboratoire. Et il faudrait
compléter le tableau noir de notre amnésique en rajoutant que ses résurrections
à répétition ont agacé les patrons des cieux qui ont décidé d’envoyé un VRP en
destruction pour mettre fin à cette anomalie. Enfin, Mitch se retrouve
mystérieusement interné à Arkham.
Ce petit paragraphe traduit deux
aspects de la série. Le premier c’est qu’il y a beaucoup d’actions, de
retournements de situations et d’éléments nouveaux à chaque épisode. Le rythme
y est trépidant, et on reconnaît cette pâte scénaristique aussi virtuose
qu’efficace de Lanning et Abnett. Le deuxième : on apprend aussi que peu
de choses sur le passé du personnage, à l’exception d’un cinquième numéro qui
fait office de flashback et qui distille au bon moment quelques informations
pour ne pas jouer éternellement le jeu de la carotte avec le lecteur. Ce
dernier est donc tributaire du point de vue de Shelley et colle à son voyage
initiatique. Et comme le hasard fait
bien les choses, le rythme de la narration compense largement les points d’ombre
de l’histoire. Comme toutes les séries qui ont fait le pas de Vertigo vers DC,
le ton y est d’ailleurs résolument adulte, puisque les deux compères ne
lésinent pas sur les morts à répétition de leur protagoniste et sur l’univers
sombre et inquiétant qui se dessine peu à peu autour de Shelley. Cerise sur le
gâteau, l’humour est aussi présent dans Resurrection Man, que ce soit dans les
situations improbables dans lesquelles le héros est empêtré et au détour de
quelques pointes sarcastiques dans les dialogues. La palette du duo est donc
complète, et malgré l’apparent bazar de la série, on les sent parfaitement sûr
dans la direction qu’ils comptent emprunter à l’avenir.
Passons au dessin, où il y a peu
à dire. Deux dessinateurs ont œuvré (c’est un peu la mode du relaunch, varier à
tout va les équipes artistiques) sur ces six premiers numéros. Fernando Dagnino
(présent sur les #1-4 et #6) livre des planches qui touchent au sublime.
Sombre, détaillé, dynamique, son style s’adapte parfaitement au rythme et la
tonalité de Resurrection Man. On attend impatiemment chacun des retours à la
vie de Shelley pour admirer les manifestations graphiques des nouveaux pouvoirs
qu’il obtient. Fernando Blanco joue les intérimaires pour l’épisode consacré au
flashback. C’est quand même un bon cran en dessous, mais comme cela sert la
diversification des cadres narratifs, cela ne dérange pas.
Resurrection Man est un must-have
du relaunch, et il faudrait déjà commencer le lobbying auprès d’Urban pour
obtenir sa publication en version française (à moins que la série ne soit déjà
dans les cartons de la fournée de septembre prochain). Lanning et Abnett sont
encore en pleine forme, et cela fait plaisir de les voir sur cette série
extrêmement prometteuse, et qui j’espère s’installera pour un bon bout de temps
dans le panorama des New 52.
Animal Man (#1-6)
Suite à la longue intervention
dans l’émission 21 de Kultur Breakdown, François Hercouët avait titillé mon
intérêt en vantant les mérites d’Animal Man, ce qui m’avait poussé à faire l’investissement
des premiers numéros. Ne connaissant là encore rien du travail qui avait été
fourni sur le label Vertigo, c’était là encore une bonne occasion de combler
mes lacunes.
Un petit point peut-être sur les
capacités d’Animal Man. Enlevé par des extra-terrestres, Buddy Baker dispose du
pouvoir d’invoquer toutes les caractéristiques des espèces animales présentes
sur Terre. En somme, il peut voler, frapper très fort, courir très vite, ses
sens sont exacerbés. Au début de la série on retrouve Buddy menait une tranquille
vie famille, avec sa femme, son fils et sa fille. Après une première
intervention où notre héros solutionne une prise d’otage dans un hôpital, Buddy
souffre de mystérieuses hémorragies, et son corps se recouvrent de tatouages. C’est
au même moment que les pouvoirs de sa fille se manifestent que cette dernière est
étrangement consciente de l’endroit où son père trouvera réponse à toutes ses
questions. Ce qui tombe plutôt bien, puisque de sinistres et morbides créatures
apparaissent bien déterminer à récupérer la fillette, et accessoirement mettre
un joli boxon sur la planète.
D’après ce que j’avais pu lire
rapidement sur le net (merci Wikipedia), Jeff Lemire opère ici une certaine
refonte du personnage et redéfinit ses origines. Pour sa première intrigue, il
tisse une nouvelle mythologie autour d’Animal Man. Récupérant certains éléments
des cosmologies shamanistes ou animistes, il structure son récit autour des
Avatars, personnages-notions par définition, et de la guerre à mort qu’ils sont
amenés à se livrer. Ici, il est surtout question de la lutte entre la Vie
animale et la Pourriture, mais il est annoncé que d’ici peu Swamp Thing sera
mis à contribution, lui-même représentant de la Vie végétale (voire plus, si l’on
se réfère à Brightest Day). Ici et là, Lemire brode également sur la thématique
des conséquences de la vie et des combats d’un super-héros sur sa famille,
thème plus connu et passage généralement obligé pour les supers estampés « urbain ».
Toutefois, comme sa famille se retrouve assez rapidement mêlée à la « guerre
des Avatars », ces six premiers numéros consacrent la part belle à l’action
et à l’exposition de l’univers particulier Animal Man. Un équilibre qui est
parfaitement respecté par Lemire, qui est à l’aise dans chacun des registres qu’il
est amené à mobiliser.
Parlons maintenant du dessin.
Personnellement, j’ai été surpris, voire très surpris, de découvrir ce type
dessin dans des pages DC. C’est très très sombre. C’est très très gore.
Manifestement l’équipe artistique a reçu carte blanche, et force est de
constater qu’ils se sont faits particulièrement plaisir. Il est évident que
lorsque l’on aborde la notion de Pourriture, le dessin doit suivre, mais je ne
m’attendais pas à que le concept soit à ce point respecté. Tout le numéro est
donc baigné dans un onirisme morbide, aussi révulsant qu’attirant. La
colorisation ne fait pas dans le clinquant et illustre à merveille la tonalité
très adulte de la série. Pour donner une idée, je pense que ce type de planche
ne dénoterait absolument pas dans les pages d’Hellblazer. C’est dire. Le dessin
peut faire débat, mais moi j’adore.
J’ai l’impression de me répéter à
chaque conclusion de mes critiques. Soit je suis chanceux, soit je suis très
bon public en tout cas je conseille particulièrement cette série, qui doit être
dans mon Top 3 du relaunch (en attendant certains poids lourds qui sortiront en
Vf). Tous les lecteurs qui sont habitués à Vertigo se doivent de se ruer sur
Animal Man tant ils se retrouveront en terrain connu, mais dans le contexte
super-héroïque. Pour les autres, laissez-vous tenter par cette atmosphère si
particulière. Pour une fois qu’on nous balance du super en mode ultra mature,
il serait dommage de bouder son plaisir. On ne peut que féliciter DC pour ce
courage éditorial, et le lectorat se doit d’appuyer ce type d’initiative. D’ailleurs
Urban, on vous attend vivement sur ce petit bijou.
Je vous donne rendez-vous à la
mi-avril pour la (vraie) fin de ce tour d’horizon des New 52 avec Swamp Thing
(que je n’ai pas encore eu le temps de lire).
A bientôt